Categories: Nouvelles locales

après l’attentat de Rafah, l’Egypte hausse le ton tandis que la Turquie appelle le monde islamique à réagir

Depuis le tragique bombardement d’un camp de personnes déplacées à Rafah, l’offensive terrestre se poursuit malgré les protestations internationales. Nos correspondants en Egypte et en Turquie décrivent les dernières réactions des dirigeants de ces deux pays.

Publié


Mise à jour


Temps de lecture : 6 minutes

Les bombardements israéliens meurtriers du dimanche 26 mai 2024 contre un camp de déplacés à Rafah ont fait au moins 45 morts et 249 blessés, selon les autorités locales. Depuis lors, Israël a plaidé cette erreur tragique, mais cette attaque a rendu furieux le Caire. Au cœur des négociations depuis le 7 octobre 2023, l’Egypte tente tant bien que mal de faire entendre sa voix pour une solution à deux États. Pris entre ses accords commerciaux et la colère de la rue, le gouvernement d’al-Sissi tente de gagner sur deux tableaux.

De son côté, la Turquie, qui a rompu toutes relations commerciales avec Israël il y a un mois, a carte blanche pour condamner totalement l’Etat hébreu, ainsi que les pays occidentaux et les pays arabes qui restent inactifs. Recep Tayyip Erdogan a fustigé un Premier ministre israélien « génocidaire »décrivant son État comme un « menace pour l’humanité »et a loué les mérites du Hamas.

En Egypte, une condamnation superficielle

Le Caire a réagi très vivement après cette attaque à sa frontière. Dans un communiqué daté du 27 mai, au lendemain de l’attaque, le ministère égyptien des Affaires étrangères a fustigé « le bombardement délibéré des tentes des déplacés par l’armée israélienne à Rafah, qui a fait des centaines de morts ». Même si le bilan officiel du Hamas s’élève actuellement à 45 morts, l’Egypte entend ici condamner, au moins en apparence, cette attaque survenue à sa frontière, notamment en soulignant son caractère intentionnel.

Les relations avec Israël sont importantes pour l’Égypte, pays en pleine crise énergétique, notamment pour ses importations de gaz israélien. Il est donc important pour Raïs Abdel Fattah al-Sissi de ne pas offenser son partenaire israélien. Mais il doit aussi satisfaire sa population, profondément pro-palestinienne. Dans cette communication « en même temps », l’Égypte risque de devenir inaudible alors qu’une guerre meurtrière se livre à sa frontière.

Depuis le mercredi 29 mai 2024, l’armée israélienne affirme haut et fort avoir pénétré dans la bande de 14 km de long séparant la bande de Gaza de l’Égypte, qui sert de zone tampon entre les deux pays. Pour détruire les tunnels du Hamas, Israël a décidé de réinvestir cette ligne frontalière, ce « no man’s land » neutre depuis 2005, sans que le Caire réagisse. L’Egypte a nié la présence de tunnels et annoncé en février que si l’armée israélienne tentait d’occuper ce couloir sous contrôle égyptien, ce serait une ligne rouge franchie par l’Etat hébreu.

Israël a franchi cette ligne rouge et l’Égypte n’a rien dit. Comme elle ne s’est pas insurgée contre la mort de deux de ses soldats, en début de semaine, à la frontière avec Gaza. Selon le ministère des Armées, une enquête est en cours, comme ce fut le cas en octobre 2023 lorsque des tirs dits « amis » ont tué plusieurs gardes-frontières égyptiens. Aucune conclusion de l’enquête n’a encore été rendue publique par les autorités égyptiennes.

En Turquie, le président Erdogan appelle à la guerre

Le bombardement israélien du camp de réfugiés de Rafah ravive également la colère du président turc. Il dénonce à nouveau l’inaction des pays occidentaux mais s’en prend également aux pays arabes. Recep Tayyip Erdogan appelle les pays musulmans à protéger leurs frères palestiniens. Il a laissé éclater son indignation dans une diatribe sans concession devant les députés de son parti, ce qui lui a valu de longs applaudissements : « J’ai ici quelques mots à dire au monde islamique. Qu’attendez-vous pour prendre une décision commune ? De quoi avez-vous besoin de plus pour réagir ? ? Dans les rues de Gaza, les chiens mangent des restes humains. Des enfants musulmans sont massacrés dans les hôpitaux, des bébés ont la tête arrachée. Des gens sont brûlés vifs dans des tentes. Quand décideras-tu de voir ça ? Quand l’Organisation de la coopération islamique poursuivra-t-elle une politique efficace et dissuasive contre ces atrocités ? Je le jure, Allah vous tiendra, ainsi que nous tous, responsables de cela.

La Turquie reproche aux pays arabes et musulmans de ne pas se joindre à la plainte pour génocide déposée par l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice. Le président turc a également mis en garde les pays de la région contre la menace posée par Israël. « pour la sécurité de l’humanité »ajoutant qu’aucun pays, y compris la Turquie « n’est pas sûr ».

Le président turc veut être le fer de lance de l’opposition à l’Etat hébreu. Il sait que c’est un discours populaire dans son pays. Très vite, après l’attaque de l’hôpital Al-Shifa, Recep Tayyip Erdogan durcit son discours contre le Premier ministre Netanyahu, le qualifiant de « génocidaire »de « criminel contre l’humanité » et se vanter les mérites du Hamas, avec lequel la Turquie entretient de bonnes relations.

Recep Tayyip Erdogan, dans ce discours très véhément, tonne aussi bien sûr à nouveau contre les pays occidentaux. Il les accuse d’avoir sur les mains « le même sang qu’Israël »et contre les Nations Unies dont « L’esprit a sombré avec l’humanité à Gaza », il a dit. Le président Erdogan distribue des bons et des mauvais points, des bons points à l’Espagne, à l’Irlande et à la Norvège pour leur reconnaissance de l’État de Palestine. Il entend affirmer la place de la Turquie dans la région, sur le plan diplomatique et économique. Si le président turc s’est disqualifié comme médiateur entre les deux parties, il se positionne comme le porte-drapeau des Palestiniens, afin de jouer un rôle dans l’après-guerre, notamment dans la reconstruction de Gaza.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides

Recent Posts

Volodymyr Zelensky prévoit de rencontrer Donald Trump lors de sa visite aux États-Unis

Le président ukrainien rencontrera également son homologue américain Joe Biden et la vice-présidente américaine Kamala Harris. Publié 19/09/2024 23:20 Temps…

1 minute ago

Le commissaire Chassaing connaîtra son sort vendredi

Condamnation ou acquittement ? Peine symbolique ou plus conséquente ? Le commissaire Grégoire Chassaing, seul poursuivi pour la mort de…

4 minutes ago

Cette erreur de brossage courante peut jaunir les dents

Une erreur lors du brossage des dents peut les faire jaunir, mais c'est facile à éviter. Avoir les dents jaunes…

8 minutes ago

Immigration : « On ne peut pas continuer à ce rythme-là », insiste le patron de la Banque nationale

Le président de la Banque nationale salue les récentes mesures gouvernementales visant à réduire l'immigration dans le pays, mais prévient…

16 minutes ago

Momentum Hockey s’associe à Wasserman : vers une migration importante d’agents au Québec ?

L'agence de représentation de joueurs de hockey montréalais Momentum Hockey s'est entendue sur les termes d'un partenariat avec l'une des…

17 minutes ago

La nouvelle pyramide du pouvoir de l’UE et l’escalade migratoire – POLITICO

En direct de Strasbourg… et de Paris… et de Berlin… et de Londres, c'est EU Confidential. Dans l'épisode de cette…

18 minutes ago