« La nomination de Yahya Sinwar à la tête du Hamas n’était pas opportune à ce stade critique. Elle pourrait avoir des conséquences négatives à plusieurs niveaux, notamment la cessation des négociations indirectes » avec Israël pour un cessez-le-feu dans le territoire palestinien, a déclaré Ibrahim Abu Daqa, 35 ans. Un autre habitant de Gaza, Bashir Qarqaz, s’est montré encore plus pessimiste : « La guerre ne s’arrêtera pas dans un avenir proche car Israël rejette Sinwar… un homme têtu qui ne peut pas céder ».
« C’est un combattant, comment des négociations peuvent-elles avoir lieu ? », renchérit Mohammed al-Sharif. « Nous sommes désormais au plus fort de l’incertitude et nous ne voulons rien d’autre que la fin de la guerre », insiste ce Gazaoui de 29 ans.
L’un des hommes les plus recherchés d’Israël
Yahya Sinwar, qui était le chef du Hamas à Gaza, a été propulsé mardi soir à la tête du mouvement islamiste palestinien pour succéder à Ismaïl Haniyeh, tué la semaine dernière en Iran, pays qui accuse Israël, son ennemi juré, de l’avoir assassiné. Sinwar est l’un des hommes les plus recherchés par Israël, qui dit ouvertement vouloir l’éliminer, comme l’a répété mardi soir le ministre des Affaires étrangères Israël Katz. Israël le considère comme l’un des cerveaux de l’attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.
Abou Dawa, originaire de Rafah, une ville du sud du petit territoire palestinien, déplacé à Deir el-Balah (centre), est lui aussi inquiet : « l’occupation (israélienne) a tué le négociateur Ismaïl Haniyeh. Qu’adviendra-t-il du combattant Sinwar ? », s’interroge-t-il. Un responsable du Hamas a affirmé mardi que la désignation de Sinwar envoyait un « message fort » à Israël indiquant que le mouvement « reste sur la voie de la résistance ».
Optimisme en Cisjordanie
Hani al-Qano, un autre Gazaoui, estime que « personne ne s’attendait à ce que Sinwar remplace Ismaïl Haniyeh » et estime que « cela accélérera la fin de la guerre ». Sinwar « pourrait avoir un impact positif sur les négociations et représenter un défi pour Israël, étant donné qu’il vit dans la bande de Gaza, au milieu de la population assiégée. Il est différent de Haniyeh qui vivait à l’étranger », explique-t-il. Haniyeh dirigeait l’organisation depuis Doha, au Qatar.
Cet optimisme est davantage partagé en Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1957 et administré par l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, dont le parti Fatah est rival du Hamas. Ce dernier a chassé le Fatah de la bande de Gaza et y a pris le pouvoir en 2007.
Le nouveau chef du Hamas ? « Une décision importante, car Sinouar vit au cœur de la bataille et sait donc exactement ce qu’il négocie, contrairement à quelqu’un qui est assis à l’extérieur du pays », a déclaré Farah Qassem, une habitante de Ramallah, en faisant référence à Ismaïl Haniyeh. « Sinouar a payé et continue de payer un lourd tribut à la guerre, donc ses décisions seront basées sur la souffrance de la population de Gaza », a ajouté l’homme de 54 ans, faisant référence aux conditions désastreuses des habitants qui manquent de tout dans ce territoire ravagé par dix mois de guerre.