Après la correction infligée par Attal, Bardella cherche du réconfort en terre Hénin-Beaumont, RN – Libération
Au lendemain de son débat avec le Premier ministre, la tête de liste du Rassemblement national pour les élections européennes a rejoué le match, tout seul, en traitant son adversaire jeudi de « premier menteur de France ».
Les fesses encore rouges du débat télévisé de la veille, où il a été corrigé par Gabriel Attal, Jordan Bardella est monté sur la scène de la salle François-Mitterrand à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), où il a tenu un meeting vendredi. soir, devant plus de trois mille supporters. Ici, en terres frontistes, l’air est plus doux et les intervenants chargés de réchauffer la salle en profitent pour frotter un peu de pommade sur le postérieur du dauphin. A commencer par le maire de la commune de 26 000 habitants, Steeve Briois, qui a ravalé pour la soirée son ressentiment obstiné contre le président du Rassemblement national (RN) qui avait promis de « roule en char Leclerc sur (s)sa mairie de merde ».
« Personne ici n’ignore que j’ai pu exprimer mes différences avec la sincérité et la franchise qui me caractérisent, mais cela n’a pas changé ma loyauté. », Briois s’efforce. Dans une allocation retournée contre « connaisseurs »LE « technocrates » et leur « arrogance »dans lequel les macronistes sont invités à se reconnaître, Marine Le Pen défend son adversaire en s’en prenant aux journalistes. « Depuis 24 heures, la presse neutre et objective nous raconte à quel point Attal a brillé, époustouflant la France par son talent. Les Français ont rendu leur verdict : une majorité plus que confortable des Français qui ont suivi le débat a accordé la victoire à Jordan Bardella.plaisante-t-elle en référence à une curieuse enquête Odoxa basée sur un échantillon de Français ayant été « exposé » dans le débat, sans qu’on comprenne clairement ce que cela signifie. Le public est ovationné, Le Pen revient sur ce sujet : « C’est assez révélateur, la différence entre les propos et ce que ressentent les Français (…) la démocratie vacille. » Juste ça.
« Victoire aux tirs au but pour Attal »
Dans la salle, plusieurs militants interrogés par Libé n’ont pas vu le débat, ou font semblant de ne pas l’avoir vu pour éviter d’en parler. Un collaborateur parlementaire convient tout de même d’être honnête : « Pour moi, c’était un match nul et une victoire aux tirs au but pour Attal. J’ai le sentiment d’avoir un peu revécu le débat Marine en 2022 : on reste sur la défensive de peur de paraître fébrile et on finit par prendre des gifles.
Sur scène, sans adversaire, Jordan Bardella peut rejouer le match à son avantage. « Hier soir, j’ai affronté le premier menteur de France : M. Gabriel Attalil se vante. Contrairement à Valérie Hayer qui ne sait plus où elle habite depuis le début de la campagne, Gabriel Attal était très agité au point de ne plus pouvoir se contenir et coupant mes paroles, j’ai compté, en gros, toutes les trente secondes. Petit chat… N’ayant pas réussi à imiter l’arrogance macroniste qu’il avait pourtant adoptée lors de son précédent débat face à la tête de liste Renaissance, au point de reprendre les formules du président de la République lors de son débat de 2017, le président de le RN se classe désormais dans le camp des « ceux qui défendent la vérité avec humilité ». « Contrairement à ceux qui nous gouvernent, nous nous soucions des gens », promet-il alors, la main sur le cœur. Avant de chanter les refrains du RN avec lesquels il semble plus à l’aise, à commencer par sa volonté de réserver les allocations familiales aux seuls Français. La foule exulte. Il finit par appeler « Tous les Français, de la droite (le public applaudit) à la gauche (le public hue) »voter pour lui le 9 juin.
La gauche unie contre l’extrême droite
A quelques encablures de là, plusieurs associations féministes organisent une contre-manifestation destinée à alerter sur les dangers que fait peser l’extrême droite sur les femmes. Notamment pour le droit à l’avortement. L’édile parisienne Alice Coffin en profite pour donner de la visibilité à la campagne européenne qu’elle coordonne pour rassembler un million de signatures autour d’un texte appelant au remboursement de l’avortement sur tout le continent. « Nous analysons que la question de l’avortement facilite la mobilisation contre l’extrême droite qui monte dans toute l’Europe », explique l’ancien journaliste. La manifestation est aussi l’occasion d’offrir le (rare) spectacle d’une union de la gauche : le député socialiste Pierre Jouvet arrive avec la locale de l’étape, Marine Tondelier, conseillère municipale de la ville, qui tombe dans les bras des insoumis. Raquel Garrido. « Alors c’est le grand retour ? », rit d’abord ? Le député de Seine-Saint-Denis se souvient de la campagne législative de Jean-Luc Mélenchon, contre Marine Le Pen, en 2012. A l’époque, la candidate d’extrême droite avait laissé des sbires distribuer un tract appelant à voter pour sa rivale en 2012. Arabe. Sur une autre, il y avait une photo du futur rebelle habillé en Hitler, devant l’entrée d’Auschwitz. A l’époque, la fille de Jean-Marie Le Pen ne faisait pas semblant.