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Alexis Congourdeau, Jérusalem au coeur

Cheveux broussailleux et barbe poivre et sel, Alexis Congourdeau lâche son sac à dos et glisse son carnet ouvert sur une page blanche sur la table du café parisien. Notre rendez-vous s’inscrit dans un planning précis : du mardi au jeudi, le quinquagénaire est à Marseille où il enseigne l’histoire-géographie au lycée technique Marie-Curie, non loin du grand hôpital de la Timone ; du vendredi au lundi, il rejoint ses trois enfants, âgés de 15 à 20 ans, à Maisons-Laffitte, dans le nord-ouest de la région parisienne.

Vacances scolaires ? Il les transmet à Israël. «J’adorerais m’y installer» confie celui qui fut guide en Terre Sainte pendant trente ans. « J’ai une vie qui reflète ma sensibilité. J’aime ce verset de l’Évangile : « Le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer sa tête. » Certains sont plus installés dans leur travail, ils deviennent propriétaires. Moi, je suis un itinérant à la recherche d’un point d’ancrage », il a dit.

« Subjugué » par la « densité » de Jérusalem

Et son point d’ancrage est Jérusalem. Alexis Congourdeau est « soumis » là-bas  » densité «  de cette ville – « densité d’événements, de lumière, de couleurs, de senteurs, d’histoire… ». Il aime la découvrir à pied, en bus ou en tramway, en flânant, l’appareil photo de son smartphone à la main pour immortaliser le « micro-événements » de la vie quotidienne (1).

« A Jérusalem, Alexis se rend dans des endroits improbables et révèle des visages méconnus. Il parvient à traduire la beauté, les contradictions, les amours. » observe Marie-Armelle Beaulieu, rédactrice en chef de Revue Terre Sainte et chroniqueur à La Croix, qui vit et travaille dans la ville sainte depuis une vingtaine d’années. L’incroyable enchevêtrement de la ville est également une grande source d’inspiration pour ses dessins, réalisés à l’encre de Chine, parfois rehaussés d’aquarelle, représentant des villes orientales luxuriantes et imaginaires.

Son goût pour l’anthropologie urbaine le plonge au cœur de la Vieille Ville. Il a étudié la rue El-Wad, la « rue de la Vallée », qui s’étend de la porte de Damas au nord jusqu’au Kotel (mur des Lamentations). Face à la curiosité de son interlocuteur, il déroule pédagogiquement les différents « usages de l’espace » où se croisent des haredim, des juifs ultra-orthodoxes, des sionistes religieux qui s’installent dans des maisons habitées par des Palestiniens, des chrétiens qui prient sur le chemin de croix de la Via Dolorosa, ou encore des musulmans, derrière leurs étals du souk.

« Une démarche respectueuse des trois religions »

« En tant que guide, Alexis a une approche respectueuse des trois religions. Il parle de chacun d’eux sans chercher à les séparer ou à les opposer – comme d’autres le font idéologiquement… Sa sensibilité l’amène à capter leur humanité. confie Anna Carter, une galeriste parisienne ukrainienne qui a découvert la Terre Sainte grâce à lui. Un voyage qui s’est brusquement interrompu dans la soirée du 7 octobre, au son des sirènes d’avertissement et des explosions de roquettes au-dessus de Jérusalem. « On sentait vaguement qu’un événement allait se produire, se souvient Alexis Congourdeau. Bizarrement, de nombreuses personnes avec qui j’ai parlé ont mal dormi la nuit précédant l’attaque. »

Face à l’embrasement des esprits et des cœurs, il refuse de céder aux injonctions simplificatrices et « pensée binaire ». Pendant un mois, pour ses étudiants marseillais, il a établi des liens entre le conflit israélo-palestinien et le programme de première année – une manière d’éclairer le présent à la lumière d’une histoire dont ils n’imaginaient pas la complexité…

Mais d’où vient son lien particulier avec la Terre Sainte ? Tout remonte à un pèlerinage qu’il fit à 18 ans. C’est sur le Mont Thabor, lieu de la transfiguration. (où Jésus révèle sa divinité à ses disciples, NDLR)qu’il « tombe amoureux du Christ et de la terre en même temps ». » Il y a un avant et un après « , il a dit. C’est du Christ qu’il puise la force nécessaire pour traverser dix années de maladie, marquées par des hospitalisations, un divorce… « Heureusement qu’il est là, je me suis accroché à lui… Ou lui à moi, il a souri. J’aime cette prière : « Sans toi, notre vie tombe en ruine. » C’est à Jérusalem que je retrouve les marques de son passage et de sa résurrection. »

—–

Son inspiration. Le philosophe Jean-Luc Marion

« Le philosophe et académicien Jean-Luc Marion est un ami de mes parents (Marie-Hélène Congourdeau, la mère d’Alexis, est diplômée en histoire, spécialiste du monde byzantin, NDLR) ; sa femme est ma marraine. Jean-Luc Marion est le co-fondateur de la revue internationale de théologie Communion. C’est une figure centrale pour moi. Nous allions courir ensemble… Il a traversé différentes épreuves et il a toujours témoigné de sa foi. J’ai lu toute sa philosophie, qui nous apprend à accueillir les choses telles qu’elles se présentent, et non à travers nos prismes. »

(1) Il publie ses créations sur son compte Instagram @metierduregard. Ses dessins et photos seront exposés dans le quartier Wadi Nisnas à Haïfa, en Israël, à la galerie L’Olivier vagabond, d’août à décembre 2024.

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.

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