La crise du Covid a accéléré l’endettement généralisé qui devrait atteindre, en moyenne pour tous les pays de la planète, 100 % du PIB en 2030. Les États-Unis représentent un tiers du fardeau.
Alors que la France se lance dans une discussion budgétaire acrobatique pour tenter de réduire son déficit public et ralentir sa dette de 3 300 milliards d’euros, le monde entier croule sous la dette publique, prévient le Fonds monétaire international (FMI). La dette cumulée de tous les pays devrait dépasser 100 000 milliards de dollars cette année, soit environ 93 % du PIB mondial. Et pourrait atteindre 100 % d’ici 2030. Une augmentation significative par rapport à 2019, avant la pandémie, où la dette mondiale était inférieure de 10 points.
« Il y a de bonnes raisons de croire que la situation est encore pire que prévu »a souligné Era Dabla-Norris, directrice adjointe du département des affaires budgétaires du FMI, en présentant le rapport. Trois facteurs expliquent cela : « augmentation des dépenses publiques, projections de dette trop optimistes et dettes non identifiées ». La hausse des taux d’intérêt au cours des trois dernières années a mis à mal les coffres de nombreux pays en augmentant le coût de leurs emprunts. La Banque mondiale rapporte qu’une quarantaine d’États sont actuellement en situation de crise ou proches de la crise, en raison d’une augmentation significative du remboursement de leurs prêts. Dans un scénario pessimiste, la dette publique mondiale pourrait atteindre 115 % du PIB d’ici trois ans.
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« Dettes cachées »
Les gouvernements sont sous pression pour financer des questions cruciales telles que le vieillissement de la population, la santé, la transition écologique et la défense, ce qui augmente inévitablement leurs dépenses. Parallèlement, les erreurs de projection et les dettes « caché » (souvent liées aux entreprises publiques) alourdissent les bilans. L’analyse du FMI révèle que 40 % d’entre eux proviennent d’événements imprévus, qui peuvent augmenter la dette publique de 1 à 1,5 % du PIB en moyenne sur un an en période de crise.
En outre, des facteurs mondiaux déterminent de plus en plus les fluctuations des coûts des emprunts publics dans les différents pays. L’incertitude politique aux États-Unis, en tant que puissance économique majeure, a des implications mondiales, tout comme les malheurs de la Chine. Par exemple, les périodes liées aux débats sur la dette américaine ont souvent provoqué des baisses des marchés boursiers et des hausses des coûts d’emprunt. Un phénomène qui affecte, par effet domino, d’autres grandes économies. Sans oublier que Washington, comme Pékin, vit à crédit. Alors que la campagne actuelle pousse les deux candidats Kamala Harris et Donald Trump à une escalade de promesses irréalistes valant plusieurs dizaines de milliards de dollars, le déficit budgétaire s’envole. Cette année, elle approchera les 2 000 milliards de dollars (6% du PIB), alors que la dette dépassera les 34 000 milliards (125% du PIB) soit un tiers du fardeau mondial ! Quant à celui de la Chine, il continue de croître rapidement en 2024, et avait atteint, en 2023, 83 % du PIB (contre 77 % en 2022).
Alors, que faire pour mettre un terme à cette dette incontrôlée ? Le moment est venu de restaurer des marges de manœuvre budgétaires, appelle l’institution internationale. Dans un contexte de ralentissement de l’inflation et d’assouplissement attendu de la politique monétaire des banques centrales, « les pays sont mieux équipés pour absorber les répercussions économiques du resserrement budgétaire »soulignent les experts. Ils estiment qu’un ajustement budgétaire bien plus important que celui actuellement prévu est nécessaire. Par exemple, pour une économie moyenne, la réduction de la dette nécessiterait des efforts budgétaires équivalant à 3,8 % du PIB d’ici 2029, bien au-delà du 1 % prévu. Cette marge de manœuvre doit être soigneusement calibrée pour ne pas aggraver les inégalités sociales, notamment pour les ménages les plus vulnérables, ni perturber la croissance.