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Barreaux de cellule sciés, voiture en attente… Ce que révèlent les premiers éléments de l’enquête sur l’attaque d’un fourgon pénitentiaire dans l’Eure

Surnommé la « Mouche », Mohammed Amra est au cœur de l’enquête. Ce n’était pas un détenu particulièrement scruté, mais son niveau de surveillance venait d’être réévalué.

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Une voiture calcinée est évacuée non loin du péage d'Incarville (Eure), où deux agents pénitentiaires sont morts lors de l'attaque de leur camionnette, dans laquelle ils transportaient un détenu, le 14 mai 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

Après le choc, les explications. Ou du moins la recherche d’explications. Après l’attaque d’un fourgon pénitentiaire au péage d’Incarville (Eure) sur l’A154, qui a fait deux morts surveillants et trois blessés, mardi 14 mai, les enquêteurs tentent de retracer le déroulement des événements. Au cœur de l’enquête : Mohamed Amra, le détenu de 30 ans toujours en cavale.

Si la traque policière a commencé, les enquêteurs ont pu commencer à se faire une idée de cette embuscade meurtrière. Dès l’attaque, la juridiction nationale spécialisée de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) du parquet de Paris a repris l’enquête et ses magistrats se sont rendus sur place. Le parquet de Paris a également contacté l’Office central de lutte contre la délinquance organisée (OCLCO) et la police judiciaire de Rouen. L’enquête porte sur les délits de meurtre, tentative de meurtre en bande organisée, évasion en bande organisée, acquisition et détention d’armes de guerre, association de malfaiteurs en vue de la commission d’un crime.

Grâce à des témoignages recueillis au péage d’Ircanville entre Rouen et Evreux, mais aussi grâce à des vidéos, les enquêteurs ont découvert le déroulement de cette attaque hors du commun. L’une des vidéos montre l’intégralité de la séquence, qui dure près de 3 minutes : vers 11 heures du matin au péage, on voit le convoi venant de la prison franchir lentement la barrière du péage. A peine passées, la camionnette et la voiture siglée de l’administration se retrouvent face à une Peugeot noire qui arrive en sens inverse. Le véhicule entre en collision avec la camionnette dans laquelle se trouve le détenu Mohamed Amra.

Attaque meurtrière contre une camionnette dans l’Eure : deux agents tués, un détenu en fuite

Selon les premiers éléments de l’enquête, cette voiture noire était là depuis quelques minutes et attendait le convoi. C’est alors que surgissent deux hommes en tenues sombres, armés et cagoulés, tandis que d’autres criminels surgissent par derrière. Selon nos informations, ils sont équipés de gilets pare-balles et de fusils d’assaut de type Kalachnikov. Ce que la vidéo ne montre pas, c’est qu’une deuxième voiture, derrière, a permis au commando de prendre en sandwich le convoi. C’est à ce moment précis qu’un ou deux surveillants pénitentiaires sont ensuite exécutés, analyse un expert du dossier interrogé par franceinfo. Les agents ont visiblement réagi sans savoir s’ils avaient blessé l’un des malfaiteurs, qui est reparti avec le détenu.

« Deux véhicules ont été retrouvés incendiés près des villes de Houtteville et Gauville-le-Campagne » dans l’Eure, a déclaré mardi soir lors d’une conférence de presse la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau. « Les agresseurs auraient également tenté de mettre le feu au véhicule abandonné au péage. » etcLes véhicules sont actuellement soumis à tous les échantillons et recherches nécessaires« , a ajouté Laure Beccuau.

Il reste des zones d’ombre, d’où partent les motivations de cette attaque sanglante. A ce stade, personne ne peut dire exactement combien d’hommes composaient cette équipe d’assaillants. Même les enquêteurs sont à ce stade incertains, face à des témoignages contradictoires. Les enquêteurs en sont convaincus : cette évasion a été particulièrement préparée par une équipe très informée.

Dans la journée de mardi, tous les policiers de France ont reçu la carte de recherche de Mohamed Amra, alias « La Mouche ». S’il n’est pas considéré comme faisant partie du haut du spectre du banditisme, il est présenté comme quelqu’un de violent. « On se doutait qu’il était capable de tout », résume un policier, interrogé par franceinfo. Fort de quelque 13 condamnations et mises en examen dans des affaires d’assassinats – dont une pourrait avoir été ordonnée depuis sa cellule – ce trafiquant rouennais a été placé en garde à vue pour tentative d’assassinat, selon une source proche du dossier. Autre élément qui intrigue les enquêteurs : selon des sources concordantes, le détenu a tenté lundi 13 mai de scier les barreaux de sa cellule. Il a ensuite été repéré et envoyé dans une unité disciplinaire.

Le « Fly » vient d’être condamné début mai à 18 mois de prison ferme par le tribunal correctionnel d’Evreux pour vol aggravé. Il est également mis en examen à Marseille pour enlèvement et séquestration ayant entraîné la mort dans une affaire de transport de drogue entre la ville de Marseille et la Normandie. Selon la chancellerie, le détenu était incarcéré à la maison d’arrêt d’Evreux et était en cours d’extraction pour se rendre au tribunal judiciaire de Rouen. Contrairement à ce qui avait été initialement indiqué par le parquet de Paris, cet homme n’était pas classé comme détenu particulièrement notable (DPS), selon l’administration pénitentiaire. Il a été classé escorte 3, selon cette même source, soit 5 agents dont un officier.

L’un des deux agents morts »laisse une femme et deux enfants qui devaient fêter leurs 21 ans dans deux jours, l’autre laisse une femme enceinte de cinq mois« , a déploré Eric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux lors d’un rapide point presse à Paris. Avant de promettre que les criminels seront « arrêtés, jugés et punis à la mesure du crime qu’ils ont commis« .

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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