Comment Donald Trump a-t-il pu se présenter alors qu’il a été reconnu coupable par la justice ? Quel impact son élection aura-t-elle sur la France ? Gabriel Solans, chercheur en civilisation américaine, répond aux collégiens.
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Elu mercredi 6 janvier 47e président des Etats-Unis, Donald Trump sera officiellement investi le 20 janvier 2025. Vendredi 15 novembre 2024, il a promis « une armée forte » après avoir dévoilé, en début de semaine, les noms de les premiers membres de sa future administration. Donald Trump a notamment nommé Elon Musk à la tête d’un ministère de « Efficacité du gouvernement ».
Gabriel Solans, doctorant en civilisation américaine à l’université Paris Cité, spécialiste du Parti républicain, répond aux questions des étudiants du collège Emile Combes de Bordeaux.
Un criminel peut être président des États-Unis
Catherine : « Si Donald Trump devait être jugé, pourquoi a-t-il été autorisé à se représenter lui-même ?
En effet, Donald Trump est la cible de plusieurs affaires judiciaires et cela ne l’a pas empêché d’être candidat à l’élection présidentielle et d’être élu. Il a même été jugé pour l’une de ces affaires et reconnu coupable. Donald Trump a falsifié des documents prouvant qu’il avait payé une ancienne actrice pornographique pour qu’elle se taise et ne révèle pas qu’elle entretenait une relation avec lui en 2006. Donald Trump sera fixé sur sa peine lors d’une audience qui aura lieu le 26 novembre. La sanction est qu’elle ne prendra pas effet pendant son mandat.
Si Donald Trump a pu être candidat à la présidentielle, c’est tout simplement parce que la Constitution américaine n’empêche pas une personne poursuivie, voire condamnée, de se présenter. Selon l’article 2, pour devenir président des États-Unis, il faut remplir trois conditions : être né citoyen américain, avoir plus de 35 ans et résider dans le pays depuis au moins 14 ans. Ce qui aurait pu empêcher Donald Trump de se présenter, c’est s’il avait été condamné à l’inéligibilité. C’est dire si la justice lui avait retiré le droit civique d’être candidat.
Trump « plus de division » que les candidats précédents
Éléonie : «Si Donald Trump n’avait pas représenté le Parti républicain, y aurait-il eu un tel comportement haineux à l’égard du candidat ? »
Selon le chercheur américain en civilisation Gabriel Solans, dans cette campagne, les deux camps se sont sentis visés par des propos haineux. « Donald Trump s’est comporté de manière méprisante et assez vindicative envers son adversaire. Le Parti républicain considère le Parti démocrate comme un ennemi. D’un autre côté, on peut aussi essayer d’imaginer quel est le point de vue d’un électeur républicain aux Etats-Unis. Une grande partie de l’électorat américain considère que le Parti démocrate et les médias, la justice de manière quelque peu généralisée, ont été injustes, haineux, méprisants envers Donald Trump.« .
Pour Gabriel Solans, cette violence politique n’aurait pas été aussi forte si le parti républicain avait choisi un autre candidat car Donald Trump incarne « une nouvelle étape dans la polarisation du système politique américain ». « Il est beaucoup plus diviseur, plus agressif, plus dur que les candidats précédents. Il a changé le standard du débat politique américain, déjà violent. Alors oui, cela aurait été plus paisible.
Il a fait des promesses sur l’immigration
Ninon : «Pourquoi Donald Trump décide-t-il de fermer toutes ses frontières ?
Lors de sa campagne très axée sur la lutte contre l’immigration, Donald Trump a promis plusieurs choses. Notamment pour achever la construction du mur avec le Mexique entamée lors de son premier mandat entre 2017 et 2021. Il a également promis d’expulser massivement les étrangers en situation illégale. Pourquoi Donald Trump stigmatise-t-il les étrangers ? Car cette stratégie politique était pour lui gagnante. Selon plusieurs sondages, l’immigration a été un facteur déterminant dans le choix des électeurs.
Mais le président élu pourrait être confronté à des défis locaux. Aux États-Unis, les États peuvent demander aux juges fédéraux de geler les politiques de l’administration en place. La Californie a déjà prévenu : elle s’opposera à la politique migratoire de Donald Trump, qu’elle juge contraire à la Constitution américaine.
Le cognac français dans sa ligne de mire
Maxime : « Trump élu, quel impact cela aura-t-il en France ?
Dans son programme, il y a un domaine qui cible explicitement la France. Donald Trump a promis d’imposer des taxes douanières sur tous les produits en provenance d’Europe, une taxe d’au moins 10 %.« On sait que, par exemple, pour le cognac, les Américains sont le premier client international et qu’une guerre tarifaire douanière pourrait être très inquiétante », souligne Gabriel Solans. Aux Etats-Unis, c’est l’exécutif qui a la prérogative des barrières douanières depuis 1974. Donc il fait ce qu’il veut. Et le Sénat, qui dispose de prérogatives en matière de politique étrangère, n’a jamais contrecarré Trump lors de son premier mandat, lorsqu’il menait sa guerre tarifaire avec la Chine.
Autre secteur qui pourrait subir les effets d’une augmentation des taxes sur les importations de produits européens : l’industrie pharmaceutique. Les États-Unis sont le premier pays étranger, hors Europe, vers lequel la France exporte ses médicaments.
Mettre fin « rapidement » à la guerre avec l’Ukraine
Mélie : «J’ai entendu dire que l’aide à l’Ukraine était terminée. Est-ce vrai ? »
Concernant la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine, Donald Trump n’a pas été très précis sur ce qu’il compte faire. Selon le chercheur Gabriel Solans, Donald Trump a pris cette semaine des décisions qui nous donnent encore des indices sur sa stratégie vis-à-vis de l’Ukraine : «Il a déjà nommé son cabinet, c’est-à-dire son gouvernement et selon les secrétaires (l’équivalent de nos ministres français)nous ressentons plutôt un penchant pro-russe. Par exemple, pour Tulsi Gabor, nommée à la tête de la communauté du renseignement, elle est très clairement pro-russe. Son vice-président, JD Vance, a clairement indiqué qu’il souhaitait la fin de l’aide à l’Ukraine et une négociation avec la Russie. Quoi qu’il en soit, Trump a décidé qu’il voulait mettre fin rapidement à la guerre en Ukraine, ce sera donc l’une des principales questions de politique étrangère au cours de ces quatre années. »