Les clubs du Top 14 et de Pro D2 doivent gérer les excès de leurs joueurs en troisième mi-temps. Un sujet encore tabou, même si la prise de conscience semble générale, notamment après les récents cas en Argentine.
Tout d’abord, un constat. Il est très difficile d’obtenir des témoignages sur ce sujet « sur », comme on dit dans la profession. « Je peux communiquer avec vous, mais honnêtement, entre la culture festive de ce sport et les impondérables du haut niveau, on danse sur une corde raide, alors on laisse faire. »prévient un président de Top 14 qui ne veut pas que son nom apparaisse. La raison ? On affecte l’image de ce sport, un jeu que les clubs vendent. Les joueurs sont souvent amenés à rencontrer des partenaires, des sponsors lors de réceptions d’après-match ou autres bodegas. Ces lieux d’hospitalité pèsent financièrement sur les clubs. Or, que ce soit celui de Montevideo avec le XV de France, ou d’autres en Top 14 ou en Pro D2, nos chères troisièmes mi-temps riment trop souvent avec excès.
Un jeu populaire à l’époque était de se saouler en moins d’une mi-temps, moins de 40 minutes !
Un directeur général d’un club professionnel tire la sonnette d’alarme. « Je me bats depuis plus de dix ans ! On se bat avec nos joueurs pendant la semaine pour qu’ils aient le bon comportement alimentaire, on fait venir des nutritionnistes mais tout est jeté à la poubelle avec la troisième mi-temps après le match où ils ingèrent trop d’alcool. J’ai découvert qu’un jeu à la mode en ce moment en Top 14 ou en Pro D2, c’est d’être bu en moins d’une mi-temps, moins de 40 minutes ! On ne peut plus les lâcher dans la nature comme ça. Nous, institutions du rugby, devons vite prendre les bonnes décisions. Ce qui s’est passé en Argentine doit servir d’électrochoc. »
Certains clubs, notamment ceux du Top 14, ont pris les choses en main. L’entraîneur d’une équipe du Top 14 qualifiée pour la phase finale nous confie : « Ce n’est certainement pas la panacée, mais quand nos joueurs sortent après une victoire ou dans un cadre de club, on désigne trois ou quatre capitaines du soir qui ont la responsabilité d’encadrer leurs coéquipiers et d’éviter les excès. Pour responsabiliser tout le monde, ce ne sont pas toujours les mêmes. Cela tourne. ».
Dans les centres de formation, les jeunes joueurs sont également sensibilisés aux bonnes pratiques à suivre. Mais force est de constater que cela ne suffit pas. Loin de là. Pour un autre président : « Le souci principal est aussi générationnel. La cocaïne est devenue la bière de la troisième mi-temps, et elle génère des comportements déviants. Comment la contrôler ? On peut l’empêcher, mais on ne peut pas mettre un policier derrière chaque joueur ! » Il serait cependant bon que les affaires Jaminet et Auradou-Jegou (ces deux derniers étant présumés innocents) constituent un point de bascule et une prise de conscience générale.
Samedi soir, un autre président de club qui avait été confronté dans sa mission à de véritables problèmes de troisième mi-temps mêlant alcool et violence, a reconnu avoir donné des instructions à son manager pour « Quand tu es en déplacement, tu reviens le soir du match », a-t-il ajouté. « A la maison, il y a les familles, les femmes, les enfants, les joueurs se serrent les coudes. C’est à l’extérieur qu’ils ont tendance à se lâcher ».. Un autre, encore, admet que sur la charte que la plupart des clubs font signer à leurs joueurs, il faudrait peut-être stipuler par écrit le bon comportement à adopter lors des troisièmes mi-temps et les sanctions prévues si besoin. Enfin, un membre du conseil d’administration de la LNR a récemment admis : « Il va falloir bouger. Ce qui s’est passé doit être bénéfique. ». Un mot pour les sages.
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