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Adaptation et formation sur le tas, les maîtres mots des entraîneurs passés de l’Olympisme au Paralympisme

Plusieurs entraîneurs de l’équipe française paralympique ont d’abord entraîné des athlètes olympiques ou de haut niveau avant de travailler avec des para-athlètes.

France Télévisions – Éditorial Sport

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Yohann Escala, entraîneur de l'équipe de France féminine de volley-ball assis, le 30 août 2024, lors des Jeux paralympiques de Paris. (LECOCQ CEDRIC / AFP)

À l’image de certains sportifs ayant connu les Jeux Olympiques avant les Paralympiques, comme Damien Letulle en tir à l’arc ou Laurent Cadot en aviron, plusieurs entraîneurs des Bleus paralympiques ont d’abord enfilé ce costume aux côtés d’athlètes olympiques lors des précédentes éditions. Dimitri Demonière, entraîneur du sprinteur Timothée Adolphe, a encadré l’équipe masculine du 4×100 m à Tokyo. Avant d’emmener les nageurs Alex et Kylian Portal vers les sommets paralympiques, Guillaume Benoist a entraîné plusieurs olympiens en 2008. Quant à Christophe Gagliano, actuel entraîneur de parajudo, il a été responsable de l’équipe masculine de judo en 2021-2022.

Si les grandes lignes de leur sport d’origine restent inchangées, le passage vers le monde du handisport ne se fait souvent pas sans essais et erreurs. « Le but du parajudo reste le même que celui du judo : soumettre son adversaire. Mais les chemins pour y parvenir sont différents. Quant à la méthode, je l’ai peaufinée au fur et à mesure car je n’avais pas, au départ, les connaissances suffisantes pour aborder le handicap », explique Christophe Gagliano, qui s’est appuyé sur ses collègues et surtout ses athlètes pour découvrir la « subtilités » du parajudo.

Contrairement au judo, les combattants de parajudo commencent leur combat en ayant déjà saisi le kimono. La phase d’approche n’existe pas. « L’enchaînement est beaucoup plus engagé. Après, ça reste du judo avec l’action, la réaction, le déséquilibre, l’enchaînement des attaques », explique le coach. Ayant apporté son expérience du plus haut niveau et ses compétences techniques, Christophe Gagliano a dû renouveler sa manière d’enseigner. Face à des athlètes malvoyants ou aveugles, il est impossible d’organiser des démonstrations visuelles des prises comme on le fait avec les olympiens.

« Armindo Rodrigues (aveugle)Je dois appliquer la technique sur lui et lui donner des signaux kinesthésiques par exemple, illustre Christophe Gagliano, d’abord déconcerté par l’hétérogénéité du niveau technique de ses athlètes. Cyril Jonard est sourd et aveugle donc je ne peux pas lui expliquer oralement. Un assistant signe dans sa main. Ensuite je le fais sur lui et je lui fais toucher. Il comprend très vite mais ça prend plus de temps. »

« Nous devons être plus précis. Nous décortiquons davantage notre travail et utilisons davantage l’audition. »

Christophe Gagliano, entraîneur de parajudo

à franceinfo : sport

Guillaume Benoist, de son côté, avait beaucoup moins l’impression de devoir s’adapter au handicap de ses nageurs, Alex et Kylian Portal. « Je ne crois pas me souvenir qu’on m’ait parlé du handicap visuel d’Alex quand j’ai commencé à l’entraîner il y a huit ans. Nous n’avons jamais fait d’adaptations, à part un chronomètre électronique avec de gros chiffres depuis quatre ans. Il est placé sur le bord du bassin pour qu’Axel et Kylian puissent voir leur temps par eux-mêmes. Sinon, c’était toujours moi qui les déclenchais. »

Pour comprendre les limites et les besoins de ses nageurs, qui ne peuvent distinguer que les silhouettes et ne peuvent pas évaluer les distances, l’entraîneur a beaucoup parlé avec eux et leurs parents. « Pour moi, ce sont des nageurs comme les autres, mais ils ont une fatigabilité plus élevée, au moins 30 % supérieure. Donc, il faut gérer la récupération », précise Guillaume Benoist, qui se félicite « la grande faculté d’adaptation » de ses étudiants. « Dans l’eau, ils s’orientent en comptant leurs mouvements de bras. La seule chose que j’ai à faire, c’est de leur emmener voir le chemin jusqu’à la salle d’appel et où nous sommes installés dans le bassin. Et ils apprennent ça très vite. »

Pour mieux comprendre les implications du handicap sur la pratique sportive, lorsque la situation le permet, les entraîneurs commencent par se mettre à la place de leur athlète. « Nous recommandons à tous nos entraîneurs de tennis en fauteuil roulant de jouer en fauteuil roulant afin qu’ils comprennent les enjeux et les difficultés », « Les joueurs de paratennis sont très exigeants, ils sont très exigeants, ils sont très flexible … « Si vous jouez debout, vous servez plus fort, le rebond est plus haut. Ici, vous vous retrouvez à la même hauteur, avec le même angle de jeu », justifie Patrick Labazuy.

De même, Yohann Escala, entraîneur de Nancy en Ligue A de volley-ball féminin (le plus haut niveau national), s’assoit sur le terrain pour diriger ses joueuses de l’équipe de France de volley-ball assis. « Le dénominateur commun de tous les entraîneurs qui passent du sport valide au parasport est la capacité d’adaptation. Par la suite, notre bagage technique nous permet de proposer des mesures correctives en fonction des pathologies et des handicaps », croit l’homme qui a découvert le volley-ball assis en 2021.

Géré par la Fédération française de volley-ball (FFVB), ​​le volley-ball assis en est à ses balbutiements à haut niveau en France : les équipes nationales masculine et féminine sont nées respectivement en 2017 et 2021. Chez les Bleues, une seule joueuse avait pratiqué le volley-ball debout avant de se lancer dans le volley-ball assis. « J’ai entraîné des joueurs de tous âges et de tous niveaux. Aujourd’hui, c’est mon expérience avec les jeunes qui m’aide, car j’ai d’abord dû leur apprendre à jouer au volley avant de développer l’équipe »souligne Yohann Escala.

La FFVB propose à ses entraîneurs deux niveaux de diplôme de volley-ball assis, une formation que Yohann Escala n’a pas tardé à suivre. « J’ai aussi contacté des entraîneurs français et étrangers pour voir ce qui se fait ailleurs. Et je m’appuie aussi sur le staff médical. » Il en va de même pour la Fédération de tennis, qui supervise le tennis en fauteuil roulant. « Nous proposons deux formations par an, chacune ouverte à 16 les gens. Dans dix années, nous avons formé 400 à 500 entraîneurs, mais malheureusement, en raison du manque d’accessibilité et d’acceptation, seulement 6 % d’entre eux ont pu mettre en œuvre quelque chose dans leur club », détaille le DTN de paratennis, qui conseille aux intéressés de se former également à la mécanique du fauteuil.

« Il n’y a pas de différences majeures entre le tennis et le tennis en fauteuil, hormis les deux rebonds et le maniement du fauteuil. Pour l’enseignement, la pédagogie, la psychologie, c’est exactement la même chose que pour les joueurs valides. »

Patrick Labazuy, directeur technique national du paratennis

à franceinfo : sport

Pour ces entraîneurs, cette expérience dans le sport handicap est aussi l’occasion d’ajouter une « une corde à leur arc professionnel », comme le dit Christophe Gagliano. « J’ai encore plus de patience, je comprends encore mieux la notion de proximité. Je laisse plus de place à l’échange », énumère l’entraîneur de parajudo. En participant aux Jeux paralympiques, Yohann Escala dit avoir beaucoup appris « dans la gestion d’une grande compétition », « dans la planification » les moments forts de ses joueurs, ou encore « Surveillance de la charge de formation ».Autant de compétences qu’ils pourront utiliser aussi bien en handisport qu’en handisport.

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