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la réduction de la durée d’indemnisation favorise-t-elle un retour à l’emploi ?

Si plusieurs études montrent qu’une durée d’indemnisation plus courte rime avec un taux de sortie du chômage plus élevé, cela peut se faire au détriment de la qualité du travail en question.

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Le Premier ministre Gabriel Attal sur le tournage de "20 heures" de TF1, 27 mars 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

Vers une troisième réforme de l’assurance chômage en moins de six ans. Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé mercredi 27 mars son intention de durcir une nouvelle fois les règles du système. Parmi les pistes envisagées par le chef du gouvernement, une nouvelle réduction « plusieurs mois » de la durée d’indemnisation du chômage, sans diminuer « moins de 12 mois ». « Mon objectif n’est pas de s’en prendre à un individu en particulier ou aux chômeurs, c’est de bousculer un système pour inciter davantage de personnes à retourner au travail », a plaidé le Premier ministre. Cette annonce a provoqué un tollé de la part des syndicats et de l’opposition.

Favorable à cette nouvelle réforme, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, s’est déclaré dans un entretien à Journal du dimanche publié le 17 mars que le « générosité » du système français « a un prix élevé : un taux de chômage toujours supérieur à celui de nos principaux partenaires économiques ». Mais la réduction de la durée d’indemnisation a-t-elle réellement un impact positif sur le retour au travail, comme le suggèrent les deux membres de l’exécutif ?

Des études soutiennent le gouvernement

Les travaux menés dans des pays à économie comparable à celle de la France tendent à le démontrer : « dans diverses études de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques)nous constatons qu’une réduction de la durée d’indemnisation entraîne une augmentation de la rapidité de recherche d’emploi »explique Bertrand Martinot, économiste à l’Institut Montaigne, un think tank libéral. « On sait, à partir de la trentaine d’études internationales disponibles, que réduire d’un mois la durée maximale d’indemnisation réduit en moyenne de dix jours la durée effective du chômage »confirme à l’AFP Stéphane Carcillo, chef de la division emploi et revenus à l’OCDE.

Citant des recherches menées en Amérique du Nord et en Europe, un rapport du gouvernement suédois (PDF) de 2011 sur l’État providence et les faits marquants du travail « une forte augmentation du taux de sortie du chômage à mesure que les allocations approchent. » Selon ce même document, prolonger la durée d’indemnisation aurait même « des effets dissuasifs importants » en recherche d’emploi. Une étude française de 2013 publiée par l’Institut des politiques publiques (IPP) va dans ce sens : « Lorsque la durée d’indemnisation passe de 7 à 15 mois, le taux de retour à l’emploi diminue de 28 % (soit un allongement de la durée du chômage d’environ deux mois et demi) »observer Thomas Le Barbanchon, l’économiste auteur de cette note.

« Cela pousse les chômeurs à s’orienter vers des emplois plus précaires »

Pour Claire Vivès, sociologue au Centre d’études de l’emploi et du travail, cette littérature scientifique est cependant à prendre avec prudence. « Ces études se concentrent sur un pays donné à un moment donné, avec des systèmes d’emploi et des caractéristiques de rémunération différents. Si on attendait de voir l’évaluation d’impact de la réforme de 2023 en France, elle serait bien plus comparable »tempère le chercheur.

De plus, retourner plus rapidement au travail ne signifie pas obtenir un emploi de qualité. Le document du gouvernement suédois indique que« un taux de sortie du chômage plus élevé pourrait être associé à des emplois de moindre qualité, avec une plus grande probabilité de se retrouver à nouveau au chômage ». De son côté, une étude publiée en 2015 dans la revue Travail et emploi (PDF), publié par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, s’est penché sur les effets d’une réduction de la durée d’indemnisation en Allemagne pour les chômeurs de plus de 45 ans. Elle a mis en évidence certains effets négatifs : les chômeuses âgées de 50 à 59 ans se sont tournées plus fréquemment vers des emplois à temps partiel. « La réduction de la durée d’indemnisation semble donc avoir détérioré la qualité de l’emploi féminin pour ces tranches d’âge »explique les deux chercheurs à l’origine de l’étude, Bruno Amable et Baptiste Françon.

« Les rares études sur la réduction de la durée d’indemnisation montrent que cela pousse les chômeurs à s’orienter vers des emplois plus précaires, des CDD ou des intérimaires, avec des salaires inférieurs »confirme l’économiste Rémi Le Gall. « Il y aura des va-et-vient systématiques entre chômage et emploi. Ce n’est pas l’objectif affiché de la réforme, qui est d’aller vers le plein emploi de qualité.« , ajoute l’enseignant à l’IAE de Nancy. « Si on réduit la durée d’indemnisation, va-t-on changer la stratégie de recherche d’emploi des chômeurs ? La réponse est oui. Mais va-t-on améliorer leur bien-être, leur capacité à trouver le bon emploi au bon moment ? Rien n’est moins certain »résume Bruno Coquet, expert affilié à laObservatoire français des conjonctures économiquesinterrogé par l’AFP.

« Si le système amène un ingénieur à devenir serveur chez McDonald’s, il est préférable pour lui, et même pour l’économie, de disposer de plusieurs mois supplémentaires pour trouver un emploi convenable. »

Bertrand Martinot, économiste à l’Institut Montaigne

sur franceinfo

Une réforme qui affecterait cette seule variable ne ciblerait également qu’une partie des chômeurs. Or, rappelle Bruno Coquet, «Les chômeurs indemnisés, visés par la réforme, reprennent actuellement rapidement le travail. Ils sont plus proches de l’emploi, plus employables, donc ils en recherchent davantage. Le reste de la population au chômage ne serait pas concerné par cette réforme. « Difficile d’ignorer que la majorité des chômeurs ne sont pas indemnisés par l’Unédic. Imputer les difficultés de recrutement à la rémunération va un peu trop vite, et surtout, ce n’est pas démontré« juge le chercheur. « Durcir les règles de l’assurance chômage (…) ne crée pas d’emplois »a ajouté l’économiste mardi sur Franceinfo. « Ce n’est pas parce qu’on réforme que les entreprises vont embaucher »soutient Bertrand Martinot.

La réduction de la durée d’indemnisation pourrait avoir une autre conséquence négative pour les chômeurs : une réduction de leur pouvoir d’achat. « L’assurance chômage vise à soutenir les revenus des chômeurs. C’est un instrument de maintien du pouvoir d’achat et de stabilisation économique en cas de crise. Ce n’est pas un instrument de retour à l’emploi.» estime l’économiste Anne Eydoux. « L’assurance chômage n’est pas responsable du chômage. Ce qui est sûr, c’est qu’en réduisant les allocations, on appauvrit les chômeurs. »ajoute le maître de conférences au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).

« La seule certitude de cette réforme, ce sont les économies en matière de dépenses d’assurance chômage », souligne la sociologue Claire Vivès. Gabriel Attal voit en effet dans cette réforme un moyen de remédier au déficit public. « Plus nous aurons de Français qui travaillent, plus nous aurons de possibilités pour équilibrer nos finances » a-t-il plaidé mardi devant l’Assemblée nationale.

Cammile Bussière

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