Par
Laurene Fertin
Publié le
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Son grand sourire, entre deux ponctuations, de quoi faire fondre votre cœur. Dans son salon, assise dans un fauteuil, Aude écrivez vos pensées à toute vitesse sur sa tablette.
Elle n’est pas comme tout le monde ; elle n’utilise pas de stylo. Réalisation de La maladie de Charcotune maladie neurodégénérative, Aude utilise ses grands yeux bleus pour mettez vos pensées par écrit numériquement.
Une façon insolite d’échanger ; un outil qui change sa vie au quotidien. « Je n’aime pas rentrer dans des cases », écrit malicieusement Aude. « Ni à cause de la maladie, ni à cause des médecins. Mais ils le savent. »
Tout dans les yeux
Ce réconfort n’a pas toujours existé depuis le diagnostic de sa maladie en 2013. Ce n’est que depuis mai qu’elle tient cette tablette iPad développé par Tobii Dynavox qui lui permet, grâce à contrôles oculaires, pour rédiger des SMS, des messages sur WhatsApp, des emails… Bref, pour entretenir une conversation.
Concrètement, Aude choisit, avec son regard que la tablette captedes mots, des lettres, des chiffres ou encore des caractères spéciaux qui lui permettent d’écrire des phrases.
Aude se tait : quelques oui ou non s’échappent spontanément parfois, mais ce sont ses yeux qui font tout. De haut en bas, de gauche à droite, sa dextérité se transposait dans son regard.
Et de l’autre côté de l’écran sur lequel elle écrit, un autre, plus petit, révèle les phrases qui se forment au fur et à mesure destiné à son interlocuteur.
«Je me sens beaucoup mieux!» »
«Je me sens beaucoup mieux!» Je me sens libre ! », s’exclame Aude à travers l’écran.
Libre de communiquer, d’oser échanger avec des personnes qui ne me connaissent pas. Plus de stress de ne pas me faire comprendre. Je peux recevoir des gens tout en étant seul.
Difficile de rester indifférent à sa bonne humeur. Aude a lancé une cagnotte en début d’année, permettant de récolter un peu plus de 10 000 euros pour l’achat de cette tablette. 151 personnes généreusement participé à cette cagnotte.
Aujourd’hui, avec le plaisir elle expérimente le chat via écran, elle ne se passerait de cet outil pour rien au monde.
« La hauteur pour moi »
Parce que perdre l’usage de la parole était en fait difficile. Correspondante de presse locale, Aude a également travaillé dans le communication pendant de nombreuses années avant que la maladie de Charcot ne soit inscrite à jamais dans son dossier médical.
« Dommage », pour cette mère de trois enfants qui avait 44 ans quand la nouvelle est tombée, à ce moment-là.
J’ai beaucoup chanté dans des chorales. J’ai réalisé que je ne parvenais plus à atteindre les notes aiguës même lorsque je chantais une comptine à ma plus jeune fille de 5 ans.
Aude consulte. Le coup de marteau tombe. La maladie de Charcot ? Elle n’en avait jamais entendu parler. C’était impensable. Les médecins lui donnent entre trois et cinq ans d’espérance de vie.
« J’étais abasourdi »
La maladie de Charcot est une maladie qui s’attaque aux motoneurones (les neurones qui transmettent les ordres du cerveau au muscle, NDLR). Le neurologue a dû me décrire la maladie, je ne la connaissais même pas. J’étais abasourdi.
A l’écran, Aude développe rapidement ses propos. Les mots défilent. « C’est une maladie qui est la moins rare des maladies rares. On ne sait pas comment cela se produit, sauf dans les cas héréditaires, ce qui n’est pas mon cas. D’où l’étonnement. »
Si Aude ne parle pas clairement et qu’elle n’a plus la pleine fonction de ses bras et de ses mains, elle conserve quand même un peu d’énergie dans son corps. « J’ai encore de la force dans mes genoux, explique-t-elle, ce qui me permet de mettre un peu de mon énergie dans les transferts entre la chaise et le lit. »
Maladie de Charcot ou sclérose latérale amyotrophique (SLA)
La sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou plus communément la maladie de Charcot entraîne une paralysie progressive des muscles impliqués dans la motricité volontaire. Elle affecte également la phonation (la production de sons) et la déglutition, indique l’Inserm. Les patients décèdent en moyenne entre trois et cinq ans après le diagnostic. Souvent, ce sont des lésions des muscles respiratoires qui en sont la cause.
Un livre témoignage
Aude entretient avant tout un enthousiasme débordant et communicatif. Même si ses yeux se fatiguent vite le soir, elle consacre une bonne partie de son temps à écrire un livre.
Poussé par mon entourage, j’ai commencé à écrire un livre il y a trois ans. Car ces 11 années ont été ponctuées, au-delà de la maladie et de ses conséquences, de rencontres improbables qui m’ont toutes apporté des solutions.
Elle fait une pause. » Ce sont des coïncidences qui n’en sont pas. Je supporte cette épreuve grâce à la foi catholique et pour moi, ça change tout », sourit Aude qui, finalement, avec un peu de recul, n’a pas tant perdu la parole.
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