Didier Deschamps est vivement critiqué depuis le début de l’Euro, et plus encore depuis l’élimination de l’équipe de France en demi-finale contre l’Espagne. A tort ou à raison, le débat pourrait durer des heures. Cependant, impossible de nier que l’on s’est ennuyé à regarder les Bleus jouer pendant la compétition. Alors, est-ce uniquement la faute du sélectionneur ou est-ce un manque de niveau au sein de l’effectif ? Le sélectionneur a-t-il vraiment des joueurs capables de jouer un jeu soigné, et surtout, quelles sont les perspectives ? Faisons le point poste par poste.
Gardiens de but
C’est la grande satisfaction du tournoi. Mike Maignan a confirmé toutes les bonnes choses que l’on pensait déjà de lui. La retraite d’Hugo Lloris lui a permis de disputer l’Euro comme titulaire, et il s’est parfaitement débrouillé, entre arrêts précieux, sérénité dans les buts et véritable leader au sein du groupe. Il a validé son statut pour les prochaines compétitions, mais il faut rappeler qu’il a déjà 29 ans. De même, ses doublures lors de l’Euro, Brice Samba et Alphonse Areola, ont respectivement 30 et 31 ans. L’avenir repose donc plutôt du côté de Lucas Chevalier (22 ans) et Guillaume Restes (19 ans), encore un peu tendres pour l’équipe A, mais avec Maignan pour les prochaines années, la tranquillité est de mise à ce poste.
Les défenseurs
Le secteur le plus fourni pour l’équipe de France, qui compte de nombreux profils intéressants. La charnière Upamecano-Saliba a été l’une des plus convaincantes de l’Euro 2024. Aucune erreur majeure à déplorer, du poids dans les duels, de la qualité dans les relances, et globalement le principal point fort des Bleus durant la compétition. Et ils ne sont pas seuls, puisqu’elle fourmille de solutions : Ibrahima Konaté, Jean-Clair Todibo, Wesley Fofana, Lucas Hernandez, Axel Disasi, Benoît Badiashile, Presnel Kimpembe s’il parvient à revenir, voire Castello Lukeba, Mohamed Simakan ou encore les axiaux-latéraux que sont Koundé et Pavard. La France dispose d’une ressource quasi inépuisable à ce poste, comme le prouve l’éclosion récente de Leny Yoro au LOSC (18 ans).
Longtemps source d’inquiétude, le poste de latéral droit a finalement été sécurisé avec talent par Jules Koundé. Intraitable durant l’Euro, malgré une adversité soulevée au fil de la compétition (Doku, Leão, Nico Williams), le Barcelonais a éteint le débat. Derrière, Pavard est toujours là, Clauss ne le sera probablement plus, et il faut espérer que les espoirs incarnés par Malo Gusto et Sacha Boey, à Chelsea et au Bayern, se concrétisent. À gauche aussi, le vivier est plutôt plein, avec les frères Hernandez encore là pour un petit moment, Ferland Mendy en soutien, et des jeunes pousses comme Truffert ou Locko.
Les environnements
Peut-être le plus gros défi pour Didier Deschamps, ou son successeur. La fin de carrière en demi-teinte de Paul Pogba a fait beaucoup de mal à la créativité française. Le retour à l’Euro 2024 de N’Golo Kanté, en réussite sur les deux premiers matches mais beaucoup moins convaincant sur le reste, ne peut pas être une solution pour l’avenir. Aurélien Tchouaméni et Eduardo Camavinga sont les deux options naturelles, d’autant qu’ils évoluent ensemble en club. Adrien Rabiot vieillit (29 ans) mais sera toujours disponible. Derrière, cela risque de manquer de régularité.
Il y a les milieux défensifs que l’on connaît déjà, comme Youssouf Fofana, Boubacar Kamara, Mattéo Guendouzi, Jordan Veretout, et les plus jeunes qui vont grandir dans les années à venir comme Képhren Thuram ou Warren Zaïre-Emery. Mais il manque clairement des profils plus créatifs, comme Pedri ou Dani Olmo pour l’Espagne, Bellingham ou Foden pour l’Angleterre. Des joueurs capables de prendre en main le jeu, d’apporter de la fluidité et de l’inspiration. Car Griezmann est bien seul dans ce secteur, et il a surtout montré qu’il était au bout de son parcours lors de cet Euro. Il faut donc regarder du côté des Espoirs, et espérer que Rayan Cherki, Maghnes Akliouche ou autre Désiré Doué prennent une dimension internationale dans les années à venir. Pour l’instant, ce n’est pas le cas. Pour produire du jeu, il faut de la qualité technique et de bons manieurs de balle, et c’est clairement ce type de profil qui manque actuellement à la sélection française.
Les attaquants
La France génère depuis plusieurs années de bons ailiers. Cela n’a pas été évident lors de l’Euro 2024, entre les performances ratées d’Ousmane Dembélé, l’incertitude persistante autour du meilleur poste de Kylian Mbappé, la gestion étrange du dossier Kingsley Coman ou le peu de temps de jeu de Bradley Barcola, mais ces joueurs sont là, dans la force de l’âge, et ils feraient pâlir d’envie de nombreuses sélections. Derrière, ça pousse aussi, avec des éléments comme Michael Olise, Désiré Doué ou à un moindre degré désormais Moussa Diaby.
Le vrai nouveau problème qui se pose, et qui était évident pendant l’Euro, sera l’identité du futur numéro 9 titulaire des Bleus. Olivier Giroud prend sa retraite internationale et n’avait de toute façon pas vraiment été utilisé lors de cette dernière compétition. Deschamps a jonglé entre Marcus Thuram et Randal Kolo Muani, avec un interlude de Mbappé en 9. Les deux premiers n’ont pas convaincu, même si RKM a été plus décisif que son partenaire. Aujourd’hui, la France a un vrai déficit à ce poste, plus en qualité qu’en quantité. Il faudra voir dans quelle mesure Mathys Tel progresse et s’affirme au Bayern Munich. Agé de 19 ans, il reste le plus fort espoir français pour devenir un top mondial à ce poste. Reste également l’énigme de Christopher Nkunku, capable de jouer devant, mais aussi en soutien de l’attaquant. Une piste possible pour succéder à Griezmann à ce poste, mais sa fragilité physique vient de lui faire rater coup sur coup la Coupe du monde 2022 et l’Euro 2024.
Si la défense française semble s’assurer un bel avenir, le milieu de terrain et l’axe de l’attaque sont loin d’offrir des axes de progression évidents et immédiats. Peu importe le sélectionneur. Proposer plus de jeu, oui, mais avec quels moyens techniques, là est désormais la question. Alors que l’Allemagne peut compter sur un duo virevoltant Wirtz-Musiala, ou que l’Espagne s’appuie sur Pedri ou Dani Olmo au cœur du jeu et sur Yamal-Nico Williams sur les ailes, la France affiche un déficit générationnel en matière de création. Cela ne suffira toutefois pas à justifier de potentielles futures prestations apaisantes…
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