à Nantes, les commerçants craignent de nouveaux incidents lors de la manifestation anti-RN
RAPPORTS – Panneaux sur la devanture, fermeture temporaire… Les chefs d’entreprise restent toujours impuissants face à l’arrivée imprévisible de casseurs. Face à la manifestation annoncée, ils se protègent comme ils peuvent.
Le Figaro Nantes
Samedi 1er juin, Nantes. Assis en terrasse, les clients sont soudain incommodés par des individus venus s’en prendre violemment à l’enseigne Starbucks. Equipés de poubelles et de mobilier urbain, ils ont cassé deux vitres et dénoncé le prétendu soutien de la marque à Israël. Lundi 10 juin, répétez. Cette fois, il est environ 20 heures. Le magasin, situé dans une rue pavée du centre, a fermé ses portes mais les salariés travaillent toujours. Des casseurs sortant d’un cortège anti-RN ont presque entièrement fracturé la porte d’entrée. « Nous avons eu très peur », se souvient Mélanie, la chef d’équipe, qui était enfermée dans une pièce avec deux collègues. A quelques heures d’une nouvelle mobilisation nationale contre l’extrême droite, « Je pète un cable », confie le dirigeant, touché par ces deux attentats en à peine deux semaines. D’autant que les services de renseignement ont de nouveau alerté sur les risques de dérives, notamment dans la cité des Ducs.
180 mètres plus loin, le cours des 50 otages, l’autre Starbucks du centre, déjà endommagé le 1er mai, a installé des panneaux de bois en début de semaine en guise de protection. Pour la première fois, il fermera à 14h « Avant, on fermait le portail seulement quand ils arrivaient… », se souvient la manager Élisa, prévenue par la police la semaine dernière de possibles chocs. A côté, l’enseigne Bouygues, cachée sous l’échafaudage, continue d’opter pour cette solution. « Quand on les voit arriver, on baisse les rideaux », explique Benjamin, vendeur. Parfois des tags sont apposés, mais plus jamais. Ils ne sont pas les plus mal lotis contrairement à d’autres, qui sont plutôt assimilés à d’horribles capitalistes à détruire.
On ne comprendrait pas pourquoi ils attaqueraient nos vitrines alors que nos commerçants sont toujours restés apolitiques et neutres.
Teddy Robert, président de Plein Centre, l’association des commerçants du centre-ville de Nantes
Pourtant, pendant ces quelques heures de fermeture, les clients n’achètent pas. En cette saison estivale où le soleil laisse à désirer, les stocks s’accumulent et chaque heure est comptée. « A chaque manifestation, nous sommes entourés par cet ultra-gauche, totalement dominant, qui nous prend en otage, nous les commerçants. C’est toujours la même chose, l’État ne fait rien », peste un commerçant, qui a décidé de s’installer dans une zone plus préservée, entre autres à cause de ces incidents répétés. S’il n’a jamais été personnellement visé, il en subit les conséquences, à savoir la baisse de fréquentation. « Nous avons l’habitude de… », déplore le gérant d’un magasin de lunettes situé en contrebas où un drapeau français a été arraché lundi. Il espère que la route ne passera pas devant sa maison.
« Nous sommes extrêmement inquiets que la manifestation dégénère. Aujourd’hui, nous ne comprendrions pas pourquoi ils s’en prendraient à nos vitrines alors que nos commerçants sont toujours restés apolitiques et neutres. », déclare Teddy Robert, de l’association des commerçants nantais Plein Centre. D’autant que le RN arrive cinquième dans la ville, contrairement à la tendance française. Et d’insister : « Nous restons extrêmement inquiets d’une manifestation violente ». Dans un arrêté préfectoral concernant l’interdiction temporaire de transport d’objets pouvant constituer une arme, le préfet de Loire-Atlantique anticipe la présence de 7 000 à 10 000 personnes dont, « comme lors de la manifestation du 10 juin 2024, des militants de l’ultra-gauche nantaise qui sont régulièrement à l’origine de dégradations de biens publics par tous les moyens lors de manifestations à Nantes ». « Nous allons travailler pour que tout se passe bien »» raconte Adrien Leclerc, syndicaliste FO qui rappelle l’organisation d’une « Manifestation pacifique pour revendiquer »aller à l’encontre de la politique d’Emmanuel Macron.
Les inquiétudes partagées par les commerçants nantais, ébranlés depuis des années, s’accompagnent d’un cambriolage spectaculaire, dans la chic et réputée rue Crébillon du centre, dans la nuit de mercredi à jeudi. Tandis que les malfaiteurs faisaient des trous dans le sol et incendiaient l’appartement situé au-dessus, l’ensemble du bâtiment était dévasté 24 heures plus tard par les flammes. Malgré l’ampleur du désastre, cet événement lié au crime organisé a beaucoup moins tourmenté les commerçants rencontrés.