Divertissement

à la veille de l’ouverture, la Croisette fébrile sur la possibilité d’un nouveau #MeToo dans le monde du cinéma

Après les accusations portées par Judith Godrèche contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon, le magazine « Elle » a publié, lundi soir, une enquête mettant en cause le producteur Alain Sarde.

Sous un ciel déjà assombri par une météo maussade, le Festival de Cannes se prépare dans l’ombre de #MeToo, sept ans après l’affaire Harvey Weinstein, qui a permis aux femmes de s’exprimer sur des cas d’agressions sexuelles, notamment dans le cinéma. A la veille de l’ouverture de cette 77ème édition, le magazine Elle a publié, lundi 13 mai au soir, les témoignages de neuf femmes accusant Alain Sarde, producteur vedette de 200 longs métrages, de viols, harcèlement et agressions sexuelles. « Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes depuis 2007, l’a décrit en 2012, dans un entretien croisé pour Cinéma françaistel un mythe, un formidable conteur qui a traversé l’histoire du 7e art », épingle le magazine avant de donner la parole aux neuf accusateurs.

Cette nouvelle affaire intervient alors que la rumeur de l’existence d’une « liste » d’acteurs, réalisateurs et producteurs français, accusés d’agressions sexuelles, circule depuis plusieurs semaines dans le microcosme du cinéma. Le 5 mai, Le Figaro fait écho, annonçant dans ses colonnes que leurs noms étaient susceptibles d’être divulgués « avant de monter les escaliers ». Toutefois, aucune enquête journalistique n’a confirmé ces rumeurs.

« Je ne sais pas d’où vient cette rumeur de liste, mais elle est infondée », a insisté Marine Turchi, journaliste spécialisée dans les violences sexuelles chez Mediapart. Interrogé par Le Parisien, le 11 mai, elle a insisté pour que « Mediapart ne publie pas une liste, mais des enquêtes, longues, étayées et respectueuses des avis contradictoires ». Toujours au micro du quotidien, Muriel Réus, co-fondatrice de l’association #MeTooMedia, confirme : « Des enquêtes journalistiques sont en cours, mais je ne crois pas à une liste. »

« Non, je ne fais pas de listes »

« Nous attendons de la transparence, de la communication et de l’action, et que l’ensemble de l’industrie remette en question ses pratiques. » déclaré à Parisien Clémentine Charlemaine, coprésidente du collectif 50/50, qui défend l’égalité, la parité et la diversité dans le cinéma et l’audiovisuel. A A 24 heures de l’ouverture officielle du plus prestigieux des festivals, le monde du cinéma affiche encore une certaine effervescence.

Judith Godrèche, qui accusait de viol deux figures du cinéma d’auteur, Benoît Jacquot et Jacques Doillon, a ainsi été accusée d’être à l’origine de la dite « liste ». L’actrice, devenue figure tutélaire de #MeToo en France, est attendue mercredi sur la Croisette, où elle présentera un court métrage consacré aux violences sexuelles. Moi aussi : le film a été réalisé à partir des témoignages d’un millier de victimes qui ont répondu à son appel lancé sur les réseaux sociaux le 10 février.

Sur son compte Instagram, l’actrice a réagi à ces soupçons la semaine dernière : « Non, je ne fais pas de listes (…) J’ai entendu ces rumeurs, mais les diffuser n’a rien à voir avec mon engagement et ne devrait rien avoir avec le métier de journaliste. Pour moi, c’est le symptôme d’une forme de panique, mais c’est aussi une manière de faire ressembler les victimes à des corbeaux, et de confondre accusations et dénonciations.

Si certains avancent qu’il ne s’agit que de rumeurs, voire d’une opération guidée par une poignée de complotistes, le festival se prépare néanmoins à l’éventualité d’un tel scénario. Selon La Tribune du dimanchequi a essayé de retracer la rumeur, « La présidence du festival a fait appel aux services de l’agence de communication Image 7, dirigée par Anne Méaux, afin d’imaginer les différents scénarios en cas de révélations graves impliquant des membres du jury ou des personnalités en compétition ». De son côté, Iris Knobloch, présidente du festival, a déclaré, le 9 mai, dans une interview à Paris Match, que « Si le cas d’un accusé se présente, nous veillerons à prendre la bonne décision au cas par cas. »

« Un festival sans polémiques »

Lundi après-midi, lors de la première conférence de presse, le délégué général du Festival de Cannes, Thierry Frémaux, a été le premier à s’exprimer directement sur ce thème. Il a d’abord répondu à la projection du court métrage de Judith Godrèche, Moi aussijustifiant sa présence dans la rubrique Un certain regard : « Dans cette salle, il y a une sorte de communion, de dialogue avec la salle, avec la presse, ce qui me semble être la meilleure position pour le film de Judith Godrèche qui dure 17 minutes. »

« J’ai vu ce film qu’elle a tourné en une seule journée avec un millier de personnes qui sont parmi les milliers de témoignages qu’elle a reçus sur le site dédié à cet effet, suite à son propre engagement sur la question des violences faites aux femmes (…) Et il m’a semblé pour nous que d’abord, à Un certain regard, puis au cinéma sur la plage où il y a encore un autre type de public, c’était le meilleur endroit pour le montrer. »

Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes

lors d’une conférence de presse le 13 mai

Concernant les rumeurs qui empoisonnent l’ambiance, Thierry Frémaux a réagi plus vivement, quelques heures avant les révélations du magazine. Elle. « Ce qui empoisonne l’atmosphère, c’est le fait qu’on en parle. (…) Avant, on ne parlait que de cinéma. Quand le festival a commencé, nous, les organisateurs, n’avions qu’une seule préoccupation, les films. seront-ils aimés ou détestés ? Quels seront les résultats ? On n’en parle plus du tout. Et l’année dernière a été une grande année pour le cinéma. aucune polémique venant du festival, car nous en avons pris soin. »

« Judith Godrèche a ouvert la voie, et bien plus que ça »

A la veille de l’ouverture du Festival, franceinfo a également rencontré Camille Cottin pour évoquer son rôle de maîtresse de cérémonie et lui demander ce qu’elle pense vouloir dire à ce sujet.

« C’est l’ouverture d’un festival. Bien sûr, il y a des choses qu’on a envie de dire. Comment on les dit ? Et comment peut-on dire qu’on veut que ce soit festif et en même temps, je ne veux pas tourner fermer les yeux sur certaines choses non plus, et d’ailleurs, cela ne serait-il pas compatible ?

L’actrice Camille Cottin

sur franceinfo

« Et puis on a quatre minutes, ce n’est pas non plus… »rit-elle, avant de poursuivre sur un ton plus décidé : «Il y aura des interventions de personnalités fortes, puissantes, des femmes qui prendront aussi la parole, qui sont des invitées importantes de cette cérémonie et de ce festival. »

Interrogée plus précisément sur le contexte plus grave dans lequel s’ouvre le festival cette année, la maîtresse de cérémonie a ajouté : « Je ne vais pas vous faire un aperçu de ce qui se passe autour, mais effectivement, Judith Godrèche a ouvert la voie, et plus encore, puisqu’elle est allée au Sénat. Il y a des questions profondes, structurelles, et le fait qu’elle vienne projeter son court métrage ici, qu’il soit diffusé ici (montre CA) le festival va vraiment de pair avec ces mouvements, les accompagne. »

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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