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A la Coupe du monde, l’industrie automobile en quête d’un nouveau souffle

Les Français aiment évidemment toujours les voitures. C’est du moins ce qui ressort d’une récente étude du CSA réalisée pour le compte de la Plateforme automobile (PFA), le lobby du secteur. Le problème c’est qu’ils n’en achètent plus. Ou bien moins depuis l’épidémie de Covid-19. Les chiffres font peur. En 2023, les constructeurs, dont les grands noms Renault et Stellantis, ont vendu près de 1,8 million de véhicules en France. Soit plus de 400 000 de moins qu’en 2019.

L’industrie joue désormais « sa survie » nous raconte Luc Chatel, le président de la PFA, qui peste contre les conséquences d’un durcissement du bonus-malus. Le secteur attend désormais de véritables preuves d’amour de la part des consommateurs. Le Mondial de l’Automobile, qui s’ouvre ce lundi à Paris, apparaît comme une occasion privilégiée pour les inciter à franchir la porte d’une concession, et à remettre la main au portefeuille.

Du rêve et des paillettes, il y en aura certainement au salon, où Emmanuel Macron est attendu ce lundi en début d’après-midi. Les près de 500 000 visiteurs attendus cette semaine pourront admirer des bolides et autres concept-cars de tous les grands constructeurs mondiaux. Mais les vraies stars seront, pour cette 90e édition, les petites citadines électriques. Les constructeurs travaillent désormais d’arrache-pied sur ce créneau prisé avec un objectif clair : relancer les ventes de voitures électriques, en baisse depuis cet été, et démocratiser cette technologie.

Plusieurs voitures symbolisent cet élan, au premier rang desquelles la nouvelle R5 de Renault. Et le fabricant de diamants n’a pas le droit d’échouer. Son patron, Luca de Meo, a sauvé Fiat en 2007 en relançant la Fiat 500. Il espère, 17 ans plus tard, connaître un succès identique avec la R5… Pour l’instant, Renault revendique 75 000 précommandes. Ce qui constitue une bonne performance dans la mesure où seules les versions les plus chères – les prix démarrent à pas moins de 34 490 euros, hors bonus – sont actuellement disponibles.

Affrontement entre de Meo et Tavares

Son grand rival Stellantis mise sur sa Citroën ë-C3, proposée à partir de 23 300 euros. Le géant franco-italo-américain compte aussi sur la citadine T03 du chinois Leapmotor, avec qui il s’est associé, pour attirer la clientèle. Celui-ci bénéficie de prix attractifs, qui démarrent à partir de 19 500 euros. La Peugeot e-208, voiture électrique la plus vendue en France au premier semestre, aura bien entendu une place privilégiée sur le stand de la marque au lion. Carlos Tavares, le patron de Stellantis, est désormais attendu au coin de la rue. Dans la foulée d’un sévère avertissement sur les résultats, le groupe a officialisé sa retraite en 2026, tout en poussant Natalie Knight, sa directrice financière, vers la sortie.

Cette émission sera sans aucun doute l’occasion pour Luca de Meo et Carlos Tavares de poursuivre leur combat à distance. Le premier milite, avec d’autres grands noms de l’industrie automobile comme les Allemands Volkswagen et BMW, pour une révision de la réglementation européenne. Si, pour l’instant, il n’est pas question de remettre en cause l’objectif de mettre fin aux ventes de voitures thermiques en 2035, Luca de Meo souhaite revoir les obligations de réduction des émissions de CO2 en 2025. Le dirigeant craint de lourdes amendes en cas de ventes des véhicules électriques ne décollent pas. En face, Carlos Tavares rejette toute idée de changer les règles du jeu, estimant que cela fausserait la concurrence.

Les débats devraient se poursuivre lors de la Coupe du monde. Le sujet n’a, il est vrai, jamais été aussi brûlant. La semaine dernière, le cabinet AlixPartners a évalué les sanctions financières que pourraient encourir les constructeurs si les nouvelles normes d’émissions de CO2 étaient appliquées. Selon un « scénario intermédiaire »ils pourraient atteindre 50 milliards d’euros, en cumulé, pour la période 2025-2029 !

« Dans le meilleur des cas, avec une véritable envolée des ventes de véhicules électriques et un ralentissement de la concurrence chinoise, ce montant serait de 28 milliards d’euros.précise-t-il. Mais dans le pire des cas, il faudrait plutôt compter sur 75 milliards d’euros. »

La concurrence de la Chine, qui jouit d’une avance très importante dans l’électricité, sera également au centre des discussions. Les constructeurs chinois sont attendus en force à Paris, à commencer par leur champion BYD. Ils comptent tous faire leur nid sur le Vieux Continent. « En 2023, les marques chinoises représentaient 12 % des ventes de véhicules électriques en Europe (3,4 millions d’unités au total)dit AlixPartners. En 2030, ils devraient atteindre 25 % d’un marché de 8,8 millions de véhicules. » Au début du mois, l’Union européenne a notamment décidé de surtaxer les véhicules » fabriqué en Chine « . Mais cette mesure ne fait guère l’unanimité. Elle n’a notamment pas été favorisée par l’Allemagne, dont la Chine est le principal marché de sa puissante industrie automobile.