À Jackson Hole, l’oracle de Jerome Powell très attendu : Actualités
Va-t-il enfin ouvrir la porte à une première baisse des taux ? C’est la question que se posent tous les analystes alors que le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, doit lancer vendredi les assemblées annuelles à Jackson Hole (Wyoming) par un discours très attendu.
Mais M. Powell ne sera peut-être pas plus verbeux que d’habitude, car il est devenu maître dans l’art de ne pas engager le dialogue avec l’institution lorsqu’il parle.
Jusqu’à présent, il a répété à plusieurs reprises que les décisions de la Fed seraient basées uniquement sur les données disponibles et que son comité monétaire (FOMC) attendait des signes suffisants indiquant que l’inflation revenait effectivement à 2%, après avoir stagné autour de 3% au cours du premier semestre de l’année.
Les données des dernières semaines ont largement convaincu les marchés que la première baisse, initialement attendue au cours du premier semestre, interviendrait finalement lors de la prochaine réunion du FOMC, prévue les 17 et 18 septembre, la dernière avant l’élection présidentielle américaine du 5 novembre.
La publication mercredi des « minutes » de la Fed, compte-rendu de la réunion précédente, a encore renforcé cette certitude : « la grande majorité (des membres, ndlr) souligne que, si les données continuent dans la direction attendue, il serait probablement approprié d’assouplir la politique (monétaire) lors de la prochaine réunion », est-il écrit.
– Augmentation du chômage –
« Il y a de fortes chances que les données récentes aient renforcé les ‘colombes’ (plus préoccupées par l’évolution du marché du travail et en faveur d’une politique monétaire accommodante, ndlr) et calmé les ‘faucons’ (plus focalisés sur la question de l’inflation et en faveur de l’orthodoxie monétaire, ndlr) au sein de l’institution », a estimé dans une note l’économiste en chef de Pantheon Macroeconomics, Ian Shepherdson.
En particulier, la révision de mercredi des créations d’emplois pour l’exercice fiscal écoulé – la plus importante depuis 2009 – a souligné que le marché du travail était déjà bien engagé dans un ralentissement avancé.
Les données publiées précédemment avaient surestimé de plus de 800 000 le nombre d’emplois créés aux États-Unis entre début avril 2023 et fin mars 2024.
Une révision qui intervient dans un contexte de hausse du taux de chômage, passé ces derniers mois d’une moyenne de 3,7% à 4,3% en juillet.
« Cela met en évidence un rythme toujours positif » de création d’emplois mais « beaucoup plus modéré qu’initialement envisagé. La nuance est importante car, pour les économistes comme pour les décideurs, elle souligne que l’économie continue de progresser, mais à un rythme plus modéré », souligne pour l’AFP le chef économiste d’EY, Grégory Daco.
– « Rééquilibrage des risques » –
Jusqu’à présent, les données montraient un ralentissement progressif de la création d’emplois, mais ces données, ainsi que la hausse relative du chômage, laissent désormais entrevoir le risque de voir ce dernier redevenir un problème majeur.
Les responsables de la Fed soulignent également, selon les minutes, « un rééquilibrage des risques liés à l’inflation et à l’emploi. Les prévisions économiques sont incertaines et le Comité reste attentif aux risques pour chacun de ses mandats ».
La hausse du chômage inquiète particulièrement les marchés, qui craignent que la « règle Sahm » ne se vérifie à nouveau : selon celle-ci, l’économie américaine entre en récession lorsque le chômage augmente de 0,5 point de pourcentage en moyenne sur trois mois.
La hausse en juillet a été de 0,53 point par rapport au mois précédent.
Tous les analystes s’attendent désormais à une baisse des taux en septembre, la majorité la voyant à 25 points de base (pb), mais près de 40 % d’entre eux la voyant à 50 pb.
Tous attendront une indication sur ce point de la part de M. Powell, ainsi que sur la probabilité de voir les coupes se succéder lors des réunions suivantes, prévues en novembre et décembre.
« Nous ne prévoyons pas que Jerome Powell force la main du FOMC » lors de son discours à Jackson Hole, a souligné dans une note Ryan Sweet, économiste en chef d’Oxford Economics, « nous serons particulièrement attentifs aux inquiétudes qu’il exprimera concernant le marché du travail ».
Pour M. Daco, le patron de la Fed « aura l’occasion d’indiquer la direction que prendra l’économie » selon l’institution et « à quel rythme se feront les baisses de taux ».
publié le 23 août à 04:34, AFP