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A Gaza, « une bombe de 1 000 kg a été découverte avec laquelle jouaient des enfants »

Au centre de la place de la République à Paris, la Pyramide de Chaussures de Handicap International s’élève ce vendredi. De petits groupes d’enfants en gilet assistent à des conférences et sont initiés au concept de champs de mines. Avec un crâne rasé et une carrure militaire, Nicholas Orr s’assoit à l’écart pour expliquer 20 minutes son rôle dans la lutte contre les engins explosifs qui, lorsqu’ils pleuvent sur les zones urbaines, tuent en premier lieu des civils, dans neuf cas sur dix.

L’ancien officier de l’armée britannique s’est rendu à Gaza à deux reprises depuis le début de l’année 2024, pour des missions de plusieurs semaines, visant à évaluer et protéger autant que possible la population civile des engins explosifs qui ne fonctionnaient pas.

De quels types d’engins explosifs avez-vous affaire ?

Dans les territoires palestiniens occupés, mon travail comprend tout ce qui se trouve au sol, comme les mines, tout ce qui est largué par avion, comme les bombes, ou tiré par des chars ou des navires. En bref, tout ce qui peut exploser mais qui n’a pas encore explosé et qui continue donc à représenter un risque pour les civils. En moyenne, 10 % de tous les engins explosifs largués ne fonctionneront pas comme prévu et resteront donc dangereux pour la population.

Où sont ces engins explosifs ?

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ils ne sont pas toujours enfouis dans le sol. Souvent, des missiles non explosés se trouvent dans les décombres des bâtiments visés. Pourtant, il s’agit de maisons et des gens, avec les meilleures intentions du monde, tentent de reprendre possession de leurs habitations. Ils tombent alors sur un engin et veulent déplacer le problème, mais c’est là que les problèmes commencent vraiment.

Même si un engin explosif est encore scellé et semble intact, s’il n’a pas fonctionné, il y a une raison et il est très difficile de savoir de quoi il s’agit. Ne le touchez pas et ne le déplacez pas. Un simple effleurement peut être mortel. Il faut le traiter avec adresse et rapidité. C’est un domaine où l’on ne peut se tromper qu’une seule fois.

Avez-vous désamorcé des engins explosifs pendant que vous étiez à Gaza ?

Malheureusement non. Il est très difficile d’avoir un impact significatif à Gaza.

 » C’est l’une des zones de guerre les plus complexes dans lesquelles j’ai jamais été. Je n’ai jamais rien vu de tel. »

Gaza est l’une des zones les plus densément peuplées du monde. Prenez une place comme celle-ci, la place de la République à Paris, si je devais désamorcer en toute sécurité une grenade en son centre, je devrais évacuer toute la place (qui fait plus de 250 mètres de long). À Gaza, il est impossible d’évacuer les gens et, de plus, je n’ai pas accès à des explosifs pour désamorcer les engins que je repère. Donc pour le moment, l’objectif est de trouver ces engins, de les marquer et d’avertir la population. J’utilise de la peinture rouge et j’écris en grosses lettres rouges le mot « danger » en arabe.

Il faut aussi prévenir. Une bombe de 1000 kg, une BLU-117 MK84 (photo ci-dessous) a été découverte, avec laquelle jouaient des enfants. Si elle explose, tout le quartier explosera avec. Derrière le mur, il y avait un camp de déplacés qui aurait été anéanti.

La bombe BLU-117 MK84 découverte par Nicholas Orr et son équipe, marquée du mot
La bombe BLU-117 MK84 découverte par Nicholas Orr et son équipe, marquée du mot « danger » en arabe.– Nicolas Orr

À quel point ces appareils sont-ils dangereux ?

Si tu es trop près, tu ne te relèves pas. L’explosion ne te soulève pas comme dans les films, elle te déchire. Si tu es assez loin, tu perds un bras, une jambe. Tu as des blessures internes, comme si tu avais été renversé par une voiture. J’ai vu beaucoup d’enfants blessés, amputés. Les hôpitaux de Gaza sont au bord de l’implosion. Handicap International a un très bon programme de distribution de prothèses qui fait vraiment la différence et qui redonne à ces enfants un semblant de normalité.

Combien de temps faudra-t-il pour débarrasser Gaza de tous ces engins explosifs ?

Il faut avant tout un cessez-le-feu durable et permettre aux humanitaires de faire leur travail. Mais pour que les humanitaires puissent mettre en place des zones pour nourrir, loger et soigner les civils en toute sécurité, il faut qu’une zone soit débarrassée de tous les restes explosifs. Même si la guerre prenait fin demain, ces engins explosifs resteraient un problème persistant à Gaza. Le déminage de l’ensemble du territoire prendra probablement plus de temps qu’une vie. À Paris et à Londres, on continue de déminer les engins explosifs de la Seconde Guerre mondiale, et c’était il y a quatre-vingts ans !

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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