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A Gaza, un père pleure ses jumeaux, tués alors qu’il déclarait leur naissance

A Gaza, un père pleure ses jumeaux, tués alors qu’il déclarait leur naissance

« J’avais encore les papiers en main, j’ai voulu les montrer à ma femme et ils m’ont dit « tu les trouveras dans la chambre froide de la morgue »« , a déclaré à l’AFPTV ce déplacé gazaoui dans le sud-ouest de la bande de Gaza, bombardée par Israël depuis le 7 octobre.

« Je voulais lui dire que j’avais écrit les prénoms des enfants, Asser et Ayssel.« , poursuit-il, ne pouvant retenir ses larmes devant la petite tente bleue où il a trouvé refuge à al-Mawassi, un réduit côtier de 46 km2 près de Khan Younis, que l’armée israélienne a déclaré zone humanitaire.

S’il a échoué ici, c’est que l’appartement qu’il occupait avec sa famille au cinquième étage d’un immeuble de Deir al-Balah, plus au nord, a été réduit en un tas de décombres mardi par l’impact d’une frappe aérienne.

Couches non trouvées

« Je ne pouvais pas voir les corps« , a déclaré l’homme dont les larmes et l’évanouissement à l’hôpital des martyrs d’al-Aqsa ont fait le tour des réseaux sociaux. Son drame a suscité l’indignation des internautes du monde entier et a même valu au porte-parole du département d’Etat américain d’être interrogé par un journaliste.

Désormais seul, Mohammed Abou al-Qoumssan garde avec lui la pile de layettes inutilisées, achetées avec sa femme pendant la grossesse.

Ici, un petit body jaune aux boutonnières décorées de marguerites blanches – « on l’a acheté en rentrant d’une visite chez le médecin et Joumana en voulait absolument deux » – confie-t-il, là un autre, rose.

Du sac qu’il a attrapé à la hâte, le père sort également un paquet de couches à moitié plein.

« Nous avons eu du mal à trouver ces couches. Depuis trois mois, nous essayions d’en acheter.« , explique-t-il, alors que tout manque dans la bande de Gaza où le lait et les couches sont désormais achetés à des prix exorbitants.

Lorsqu’il épouse Joumana Arafa, une jeune pharmacienne, le 20 juillet 2023, la bande de Gaza connaît un été chaud et calme. Le blocus israélien dure depuis 17 ans et toute chance de quitter le petit territoire semble impossible.

Mais le jeune couple avait un rêve : avoir des enfants. La guerre ne les a pas fait renoncer à ce rêve.

Le 7 octobre, des commandos du Hamas ont lancé une attaque sans précédent en Israël, entraînant la mort de 1.198 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles israéliennes.

La réponse israélienne a fait jusqu’à présent près de 40 000 morts – dont 115 enfants de moins de huit mois – selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza contrôlée par le Hamas.

« Plus que ma sœur »

Bien qu’enceinte, Joumana n’a pas arrêté de travailler.

Dans la bande de Gaza ravagée, où seuls 16 hôpitaux fonctionnent encore partiellement – pour 2,4 millions d’habitants – elle est allée chaque jour aider, en tant que bénévole, à soigner le flux de blessés et de malades chroniques désormais privés de médicaments.

« Jusqu’à son septième mois, elle a aidé dans les hôpitaux, elle disait qu’elle le faisait pour remercier Dieu de lui avoir envoyé ses enfants.« , témoigne le veuf, qui a également perdu sa belle-mère dans la grève de mardi.

« Ma mère et mes frères ont été transférés en Égypte pour y être soignés, il ne me reste que ma sœur à Gaza » dit-il, assis sur un mince matelas en mousse.

En plus de dix mois de guerre, dit-il, «nous avons perdu des amis, des êtres chers, nous avons beaucoup souffert, nous avions très peur et nous avons beaucoup fui« .

« J’ai toujours eu peur que ma femme fasse une fausse couche à cause des déplacements constants d’un endroit à un autre.« , poursuit-il.

Aujourd’hui, Mohammed Abou al-Qoumssan ne bouge plus. Prostré devant sa tente, il regarde avec incrédulité ces actes de naissance qu’il devra un jour se résoudre à modifier. Pour y ajouter la date de décès de sa fille et de son fils.

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