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Européennes 2024 : comment en finir avec la règle absurde des 3 % ?

Bienvenue dans Absurde. L’Union européenne (UE) pourrait être une force de développement des services publics, de financement de la transition écologique et de formation. C’est tout le contraire. De par sa construction libérale, l’UE impose, avec le pacte de stabilité, deux règles absurdes : un État ne peut afficher un déficit et une dette publique supérieurs respectivement à 3% et 60% de son PIB.

Ces plafonds figurent dans le traité de Maastricht, approuvé en France par référendum en 1992. À l’époque, le PCF était la seule force parlementaire à s’y opposer. Les socialistes, les Verts, l’UDF et la direction du RPR étaient favorables au oui.

Cette règle des 3% n’est pas celle d’un bon père de famille qui gère correctement ses fonds. C’est une arme contre les services publics, car elle s’accompagne de la procédure du « Semestre européen » pour forcer les États hors-la-loi à se mettre au pas : ces derniers s’engagent auprès de la Commission à procéder à des coupes dans les services publics et les prestations sociales. Ainsi, la réforme des retraites était au cœur du programme national de réforme français.

La gauche veut briser cette barrière de l’austérité

L’unanimité autour de ces règles n’est plus requise. A gauche, tous les partis souhaitent assouplir le corset. Remettre en cause la règle des 3 %, c’est préserver les services publics et redonner des marges de manœuvre démocratiques aux États. C’est aussi se donner les moyens de financer la transition climatique.

Pour la France, les besoins sont, selon un rapport de France Stratégie de mai 2023, à 2,3% du PIB, soit 66 milliards d’euros annuels jusqu’en 2030. Cependant, conformément aux demandes de Bruxelles, la nouvelle trajectoire budgétaire arrêtée en février dernier par le gouvernement de Gabriel Attal a conduit à une réduction d’un milliard d’euros par an des fonds cruciaux pour la rénovation énergétique des logements.

Aux élections européennes, la liste de Raphaël Glucksmann (Place publique) souhaite la mise en place de « règles climatiques » qui poussent les États à investir « dans la transition écologique » jusqu’à 2% du PIB, en « exclure les dépenses vertes et équitables du calcul du déficit excessif ».

Les communistes, avec Léon Deffontaines, proposent de « remplacer le pacte budgétaire, le « Semestre européen » et le Traité de coordination, de stabilité et de gouvernance (TSCG) à travers un pacte social et démocratique pour le développement durable. Il appartient à ces derniers de permettre le financement d’une nouvelle industrialisation, le développement des services publics et la mise en place d’une écologie populaire.»

Mettre fin à la règle des 3 % appelle une autre construction européenne. Cette règle n’est pas tombée du chapeau. En 1992, elle a convaincu les Allemands, pétrifiés par le spectre de l’inflation, que le mark fort serait remplacé par un euro fort, car la hausse des prix pourrait éroder les revenus du capital. De plus, ce « frein à l’endettement » est une manière pour les gouvernements dits « frugaux » (Allemagne, Pays-Bas, Finlande…) d’éviter une « Europe des transferts », une UE où les pays les plus riches aident les plus pauvres.

Une règle balayée en temps de crise

En réalité, ce concept a déjà été mis à mal. Depuis son entrée en vigueur, le pacte de stabilité n’a pas vraiment été respecté. La France n’est jamais descendue sous la barre des 3% depuis… 2008, et le gouvernement ne prévoit de respecter la règle qu’en 2027. En 2023, le déficit était supérieur à 3% du PIB dans 11 Etats sur 27. Après la crise financière de 2008 , pendant la crise du Covid après 2020, les gouvernements ont accepté de déroger aux règles. En mai 2020, un plan de relance européen, sous la forme d’un prêt commun de 750 milliards d’euros, NextGenerationEu, a même été créé pour aider les États.

Cependant, supprimer la règle des 3 % ne protégerait pas les marchés financiers et leurs taux d’intérêt usuraires. Cela nécessite une autre méthode de financement de la dette, notamment en utilisant le pouvoir de création monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Ce que cette dernière a commencé à faire, après la crise de 2008, sous la houlette de son gouverneur de l’époque, Mario Draghi, dans le but de sauver l’euro « quoi qu’il en coûte ».

Le 17 mai, lors d’une réunion publique à Antraigues, plusieurs dizaines de militants, l’économiste communiste Frédéric Boccara, le maire socialiste de la ville Gilles Doz, des syndicalistes, pour alimenter le débat, ont lancé un appel, publié dans Humanité du 5 juin, pour « un fonds européen pour le développement solidaire des services publics, financé par la création monétaire de la BCE, finançant à 0% les Etats de l’ensemble de l’Union européenne, s’ils développent l’emploi et la formation dans leurs services publics ».


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William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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