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Dans les Bouches-du-Rhône, l’aqueduc de Roquefavour, le plus grand pont de pierre du monde, se dévoile

EN IMAGES, EN IMAGES – Après près de quatre années de travaux colossaux, l’aqueduc de Roquefavour, joyau du patrimoine méconnu de Provence, a été entièrement rénové. Deux fois plus grand que son ancien cousin le Pont du Gard, il alimente Marseille en eau depuis près de deux siècles.

Le Figaro Marseille

Au détour d’une route départementale, soudain, elle se dévoile, avec son architecture imposante, au milieu de la végétation. Qui pourrait croire que, dans la petite ville de Ventabren, non loin d’Aix-en-Provence, se trouve le plus grand aqueduc en pierre du monde ? Deux fois plus grand que son célèbre cousin antique le Pont du Gard avec ses 375 mètres de long et ses 83 mètres, l’aqueduc de Roquefavour est l’un des trésors cachés du patrimoine provençal.

L’aqueduc de Roquefavour rénové

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Construit de 1841 à 1847 par 5 000 ouvriers dont 300 maçons pour transporter l’eau de la Durance à Marseille, l’ouvrage impressionne, et à dessein. A l’époque, la cité phénicienne, qui puisait jusqu’alors localement ses réserves d’eau, était confrontée à une épidémie de choléra qui la poussait à revoir son approvisionnement en eau. « Aujourd’hui, si vous voulez, tout le monde veut la fibre chez soi, compare Laurent Deloince, responsable des opérations au pôle eau et assainissement de la Métropole Aix-Marseille. Au 19e siècle, nous voulions de l’eau. Aussi, lorsque l’ingénieur Franz-Major Montrichier a conçu cet aqueduc, il s’est dit qu’il fallait faire des choses emblématiques, visuelles, pour représenter l’arrivée de l’eau à Marseille. Et c’est pour cela que ce travail est remarquable. Ce qui aurait coûté moins cher à l’époque aurait été de réaliser une structure métallique d’une vingtaine de mètres de haut et d’y installer un tuyau. »

Au contraire, dans une logique que l’on appellerait aujourd’hui marketing, Franz-Major Montrichier préfère marquer les esprits et lancer ce projet monumental, en utilisant un dénivelé naturel pour permettre à l’eau de s’écouler. Et voici l’aqueduc de Roquefavour et ses 160 000 pierres taillées – qui pèsent de 6 à 15 tonnes chacune – sortant de terre, et servant encore aujourd’hui après avoir traversé les âges, fièrement debout, sans heurts, résistant même au plus grand tremblement de terre jamais enregistré en France. , en 1909, à Lambesc, non loin de là.

Chutes de pierres et soucis

Ce « bijou » comme le décrit la présidente de la métropole Aix-Marseille Martine Vassal, chargée de sa gestion, se retrouve même classée monument historique en 2005. Mais dans le même temps, des inquiétudes apparaissent quant à l’avenir du majestueux aqueduc. En 2007, la SNCF, qui exploite une voie ferrée juste en contrebas, avait signalé des chutes de pierres provenant de l’ouvrage. Des pierres sont également signalées sur la route départementale voisine, faisant craindre un délabrement du monument, avec sa façade complètement noircie par les années et la pollution.

« L’aqueduc devenait extrêmement vieillissant et nous ne pouvions plus attendre longtemps », rapporte Martine Vassal. En juin 2020, la métropole a décidé de mettre en œuvre un projet d’envergure pour stopper la dégradation naturelle de l’aqueduc et sécuriser le bâtiment. Les compagnons du devoir se mettent en ordre de bataille pour tenter de sauver l’aqueduc, sans jamais interrompre son fonctionnement.

Après avoir relevé au scanner les 80 arches réparties en trois niveaux pour établir un plan tridimensionnel de la structure, les ouvriers, tels des médecins, cherchent d’abord à poser un diagnostic sur la vieille dame de pierre. Après avoir sondé les fondations de l’aqueduc jusqu’à douze mètres de profondeur, ils ont alors commencé à nettoyer la façade, devant régulièrement enlever les figuiers qui avaient pris racine au milieu des joints.

Un immense échafaudage

Sur un immense échafaudage pesant jusqu’à 1 800 tonnes, ni plus ni moins que le deuxième en France après celui de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, les compagnons frottent ensuite chacune des pierres, à l’aide d’une tige projetant du microsable. Ce décapage à sec avait pour but d’éliminer les saletés de la surface.

Et au fur et à mesure de ce travail minutieux, l’aqueduc dévoile ses secrets. « Comme avant, c’était noir, on pensait que c’était une couleur unie, explique Laurent Deloince. Mais une fois décapées, nous avons découvert qu’il y avait de nombreuses nuances dans les pierres, avec des calcaires blancs, ocres ou même gris ! » Une fois les pierres soigneusement nettoyées, l’architecte en charge des travaux doit sonder une à une toutes les pierres marquées et numérotées, en tapotant dessus avec un maillet. Les blocs défectueux sont ensuite retirés, détruits et remplacés par des pierres soigneusement choisies dans une carrière d’Alès dans le Gard, avant d’être hissés à leur place.

En 2024, après 44 mois de travaux, l’aqueduc retrouvera enfin sa splendeur et sa solidité. « C’est l’assurance de voir cet aqueduc transporter l’eau potable de Marseille pendant encore 150 ans », s’enthousiasme le maire de Ventabren, Frédéric Vigouroux. Pas moins de 20 millions d’euros ont été nécessaires pour réaliser cette gigantesque restauration, dont 62 % ont été financés par la métropole, le reste étant assuré par l’État et l’agence de l’eau.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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