malgré un surcoût de plus de 80 millions d’euros, le nouveau centre aquatique olympique peut-il être rentable après les JO ?
Mis à la disposition du comité d’organisation depuis mars dernier, le Centre aquatique olympique (CAO) a été inauguré jeudi par Emmanuel Macron. Il sera ouvert au public en 2025 après des travaux d’héritage.
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Une île au milieu du béton. Comme une sorte d’Atlantide, mais en espérant que cette fois elle ne soit pas engloutie. Des risques existent cependant pour le Centre aquatique olympique, l’une des rares infrastructures construites pour les Jeux de Paris. Avec l’Adidas Arena Porte de la Chapelle à Paris, le CAO a été construit, en Seine-Saint-Denis, pour accueillir les épreuves des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Inauguré jeudi 4 avril par le président de la République Emmanuel Macron, il y accueillera les épreuves de plongée et de natation. synchronisésur les deux semaines de compétition, ainsi que la phase préliminaire du water-polo, la première semaine.
Le CAO répond avant tout à un besoin important au sein de la Seine-Saint-Denis, département le plus mal loti d’Ile-de-France en matière de piscines, avec seulement 37 piscines pour 1,6 million d’habitants. « En tant que maître d’ouvrage, la Métropole du Grand Paris, (…) laissera un héritage à la ville de Saint-Denis, au département de la Seine-Saint-Denis et à l’ensemble de la Métropole, s’est réjoui le président de la Métropole Patrick Ollier dans le dossier de presse, daté de mars 2024. Il s’est particulièrement réjoui d’avoir «un Centre Aquatique Olympique d’une grande modernité, doté de quatre bassins de tailles différentes dont un de taille variable, qui pourra accueillir le centre de plongée français et d’une modernité exemplaire lui permettant d’accueillir, instantanément, 3 850 personnes, des scolaires aux plus grands compétiteurs « .
« Une dimension multisports » pour rentabiliser les infrastructures
Le coût de cette infrastructure, qui comprend également la traversée piétonne et cyclable de l’autoroute A1 reliant ainsi le Centre aquatique olympique au Stade de France, s’élève à 174,7 millions d’euros. Un financement entièrement public qui a fait parler. Dans le dossier de candidature, la piscine olympique devait coûter initialement moins de 70 millions d’euros, un coût affiné à 90 millions d’euros dans le projet final déposé en septembre 2017.
Pour rentabiliser l’ancien CAO, la Métropole du Grand Paris a mis l’accent sur « dimension multisports de l’équipement » dans le but de faire « Un endroit où vivre ». Ses atouts : trois courts de padel et trois autres terrains de football à 5, une salle de fitness et une salle d’escalade de 1 000 m². Un espace restauration est également prévu, ainsi qu’une déchetterie sportive. Si pour l’instant le lieu est réservé à l’accueil des Jeux olympiques, il sera transformé dans sa version définitive en octobre prochain, avant son ouverture au public en 2025.
Un modèle judicieux selon Virgile Caillet, expert en économie du sport et délégué général de l’Union sport et cycle. « Si on ne garde qu’une seule piscine, les gens viendront se baigner, et c’est tout. On sait que le prix d’entrée à une piscine, qui oscille entre cinq et dix euros, n’est pas élastique. Il faut donc trouver d’autres moyens d’inviter les gens à séjourner, à consommer et à en faire une destination sportive.« il analyse.
« Avec les autres activités parallèles, cela devient presque un parc d’attractions sportives. Nous lui donnons du sens en dehors des grandes compétitions.
Virgile Caillet, expert en économie du sportsur franceinfo : le sport
Le projet se veut avant tout diversifié, même si le modèle du centre aquatique n’est généralement pas rentable, « notamment parce qu’il y a eu une explosion des coûts énergétiques, et sur les volumes d’eau à chauffer et maintenir en température, il est très compliqué d’être en équilibre », il insiste encore. Même s’il est encore trop tôt pour juger de la rentabilité de CAO, Virgile Caillet se montre confiant. « Le CAO a été confié à un délégué du service public, ce qui est plutôt un gage de bonne gestion. » Si la partie restauration reste la plus rentable, « ça n’a de sens que si l’on vient de faire une activité. Il est difficile de séparer les deux », » décide l’expert économique.
Le modèle du CAO n’est pas unique en son genre et s’inspire de ceux mis en œuvre à l’Aquaboulevard à Paris (fréquentation estimée à 4,35 millions de visiteurs par an en 2019 selon le dossier de consultation réalisé en 2022), ou au Cercle des nageurs à Marseille. Par exemple. Ce dernier, club privé composé de 4 000 adhérents, accueille des sportifs de haut niveau et propose également des activités complémentaires, comme une salle de fitness, un terrain de pétanque et un espace restauration. Avec une fréquentation de près de 300 000 entrées par an, Paul Leccia, son président, reconnaît « qu’il n’y a que les dépenses et le déficit. Notre budget repose sur les recettes des abonnements (1.700 euros par an, et 2.300 euros de droits d’entrée), quelques maigres subventions et du mécénat. » Mais il défend cette question de l’espace de vie, indispensable à la viabilité du club.
Des activités en hausse
Un bon point est également accordé pour les activités choisies, selon Virgile Caillet. « En Ile-de-France, il y a peu d’offres de padel par rapport à la demande. En pariant sur ce sport, on ne risque pas de se tromper. C’est une activité qui a encore de très beaux jours devant elle, comme l’escalade. autre part », note ce spécialiste. Cette offre multisports permet également d’attirer un public varié ; la piscine d’un côté avec un public universel et intergénérationnel, et d’un autre plus jeune avec de nouveaux sports. « Ces centres multiactivités répondent aux attentes et aspirations de la génération millennial, âgée de 20 à 35 ans, qui souhaite pratiquer une activité dans un contexte agréable, quand, où et avec qui elle veut »souligne Virgile Caillet.
« Cela répond aussi à un phénomène que l’on constate dans les études : nous ne sommes plus les athlètes d’un seul sport. Aujourd’hui, on estime qu’un Français pratiquant une activité physique régulière pratiquera quatre activités différentes. «
Virgile Caillet, expert en économie du sportsur franceinfo : le sport
L’objectif était avant tout d’éviter que le CAO ne devienne un éléphant blanc, autrement dit une réalisation prestigieuse qui s’est révélée plus coûteuse que bénéfique. « C’était toute la difficulté d’avoir des équipements aux normes ambitieuses dans le cadre des JO, et dont le département avait besoin, mais en étant dimensionné d’un point de vue économique et raisonnable », », soulève Virgile Caillet.
La capacité des stands suit également cette logique. « Construire une installation de 15 000 places aurait été critiquée, avec l’argument qu’elle n’aurait jamais été utilisée à sa pleine capacité. Le choix s’est porté sur l’installation de 5 000 places. La démarche consistant à dire : « Nous profitons des Jeux pour avoir un outil olympique, alors que raisonner sur le plan économique était la bonne chose' », il croit. Grâce à ce nouveau Centre aquatique olympique, la France pourra également à nouveau accueillir les championnats d’Europe de natation, à partir de 2026. La France ne les a plus organisés depuis 1987, à Strasbourg.