En Afrique du Sud, le président Cyril Ramaphosa signe la loi instaurant la couverture santé universelle
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a promulgué mercredi 15 mai une loi instaurant une couverture sanitaire universelle. La signature de ce texte, resté en élaboration pendant une douzaine d’années, intervient deux semaines avant des élections cruciales.
Dans la première puissance industrielle du continent, classée pays le plus inégalitaire de la planète par la Banque mondiale en 2022, les hôpitaux publics sont souvent surpeuplés et manquent de ressources ou de personnel. Le tour le plus privilégié vers le secteur privé. Mais en 2022, seuls 12 % des habitants pourront se permettre ce type de soins coûteux. Baptisé National Health Insurance (NHI), le nouveau système de couverture santé vise à garantir à quelque 62 millions de Sud-Africains le même accès aux soins à des tarifs abordables fixés par l’État, grâce notamment à la création d’un fonds financé par les impôts et les cotisations.
« Le système national d’assurance maladie promet de mettre fin aux inégalités flagrantes qui déterminent depuis longtemps qui a accès à des soins adéquats et qui est négligé », s’est félicité M. Ramaphosa lors de la cérémonie officielle de signature à Pretoria, retransmise en direct à la télévision. Selon le Chef de l’Etat, le NHI contribuera à « Réduire la pauvreté » dans un pays en proie à un chômage endémique, qui touche près d’un tiers de la population en âge de travailler.
La mise en œuvre de la loi, vivement critiquée par l’opposition, pourrait cependant prendre plusieurs années. La création du fonds de financement est prévue en plusieurs phases et ne se fera pas » en un jour « a insisté le ministre de la Santé, Joe Phaahla, lors de la signature.
Des débats intenses
L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi controversé en juin 2023, après d’intenses débats. L’opposition s’est farouchement opposée au texte, craignant que « la promesse de tout offrir à tous » provoque l’effondrement d’un système déjà surchargé et un exode des professionnels de santé.
Mercredi, le premier parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), a critiqué dans un communiqué la signature d’un « Peine de mort pour un système de santé défaillant » du pays. L’INSA, « présentée comme la panacée à nos problèmes de santé, n’est autre qu’un instrument brandi par l’ANC (le Congrès national africain au pouvoir) manipuler les électeurs lors des prochaines élections »selon la DA, qui évoque également un coût de mise en œuvre « exorbitant »estimé à l’équivalent de plus de 15 milliards d’euros par an.
L’Afrique du Sud organise le 29 mai des élections générales qui s’annoncent tendues pour l’ANC, au pouvoir depuis trente ans. Le parti historique risque pour la première fois, dans un contexte socio-économique morose, de perdre sa majorité absolue au Parlement et d’être contraint de former un gouvernement de coalition. L’ANC est « prêt à sacrifier tout le système de santé pour rester au pouvoir un autre mandat »» a ajouté le FF Plus, un petit parti d’opposition à majorité blanche.
Selon Anja Smith, chercheuse en économie à l’université de Stellenbosch, le pays, qui connaît une croissance économique quasiment arrêtée depuis une dizaine d’années et qui n’est plus qu’à 0,6% en 2023, « ne peut clairement pas se permettre une telle mesure à l’heure actuelle ».
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Les professionnels de santé publique espèrent néanmoins constater une amélioration générale de la qualité des soins avec le nouvel instrument. « Le secteur de la santé publique est actuellement sous-financé par rapport aux besoins de la population »a déploré auprès de l’AFP Tracey Naledi, médecin et professeur à l’université du Cap. « Le NHI pourrait fournir des ressources supplémentaires et contribuer à améliorer les résultats en matière de santé »a-t-elle ajouté, tout en disant attendre des détails sur la mise en œuvre du système universel.