Ouest-France cesse de publier sur le réseau social
C’est le premier grand média français à faire ce choix, après ceux du Guardian au Royaume-Uni et de Vanguardia en Espagne.
Les comptes Ouest-France X seront désormais silencieux. Les grands médias régionaux ont annoncé ce mardi qu’ils cesseraient d’alimenter le réseau social américain, propriété d’Elon Musk depuis deux ans. « Cet outil qui aurait pu être fabuleux pour la démocratie est devenu un domaine où la loi n’est pas appliquée »explique au Figaro Xavier-François Lefranc, président du directoire de Ouest-France. Une vision contradictoire avec la philosophie des médias bretons, dont l’actionnaire est l’Association de soutien aux principes de la démocratie humaniste. « Nous devons être logiques avec nos valeurs »ajoute-t-il. Ouest-France est le premier grand média français à prendre cette décision. Le britannique The Guardian et l’espagnol La Vanguardia ont fait le même choix la semaine dernière, dénonçant « une plateforme toxique ».
Les journalistes de Ouest-France seront libres de continuer à publier leurs articles sur leurs comptes X personnels. Mais les comptes officiels des médias ne relayeront plus rien. Ouest-France avait déjà fortement ralenti son activité sur l’ancien Twitter depuis janvier. Les comptes officiels se sont contentés de relayer certains tweets de ses propres journalistes, au rythme d’une vingtaine de publications par semaine. « Auparavant, nous automatisions la publication sur X de tous les articles publiés sur la page d’accueil de Ouest France, soit 200 à 300 articles par jour »indique Loup Lassinat-Foubert, responsable du pôle réseaux sociaux.
Cet entre-deux (beaucoup moins de publication sur « Nous avons eu les dernières discussions aujourd’hui et tout le monde est impliqué dans cette décision collective »souligne François-Xavier Lefranc. Ouest-France ne supprimera pas ses comptes sur X afin d’éviter que d’autres soient créés en son nom par des personnes ou groupes mal intentionnés.
« Les personnalités politiques doivent aussi se remettre en question »
Dans un communiqué, le groupe de médias indique qu’il ne « ne semble ni judicieux ni opportun d’agir face aux excès, X contribue également à empoisonner le débat public, pourtant vital pour la démocratie. »
« Ce que nous souhaitons, c’est que la loi et en premier lieu la loi sur les services numériques soit appliquée par X »qui fait actuellement l’objet d’une enquête de la Commission européenne sur ces sujets, ajoute Xavier-François Lefranc. « Ce qui se passe sur cette plateforme est extrêmement grave. Au-delà des médias, les personnalités politiques qui utilisent activement cette plateforme devraient également se demander où elles mettent leurs mots. »tandis que les dernières élections présidentielles américaines, où Elon Musk a joué un rôle important dans la campagne de Donald Trump, « a montré que cette plateforme était entre les mains de pouvoirs sans contrôle »ajoute le gérant. « Nous ne pouvons pas tolérer cela. »
Les relations entre les médias et X sont devenues très complexes depuis l’arrivée d’Elon Musk à la tête du réseau social. Ce dernier, qui ne cache pas son mépris envers les médias traditionnels, n’a cessé de prendre des décisions qui ont entraîné une baisse de la visibilité des articles de presse au profit des créateurs de contenus. Le trafic de X vers les sites média est aujourd’hui très faible. Le retrait de ce réseau n’a donc aucun impact sur les audiences.
En France, la plateforme est également en conflit avec plusieurs groupes de presse, dont Le Figaro, car elle refuse d’entrer dans les négociations pour le paiement des droits voisins auxquelles la loi la soumet depuis 2019. Mais les grands groupes de médias ont néanmoins préservé leur présence sur X, notamment pour ne pas abandonner ses 20 millions d’utilisateurs français aux fake news.