Face à la colère des Départements, Michel Barnier veut augmenter les « frais de notaire » : quel impact sur le marché immobilier ?
Le Premier ministre a annoncé vendredi son intention d’augmenter les droits de mutation de 0,5 point pendant trois ans. « Un chèque direct signé des acheteurs immobiliers aux départements », estime l’experte Séverine Amate.
Une nouvelle crevaison pour en adoucir une autre ? Vendredi, face à près d’une centaine de présidents de conseils départementaux en colère contre un projet de loi de finances 2025 qui affaiblit leurs capacités budgétaires, le Premier ministre Michel Barnier a fait une nouvelle annonce : il envisage d’augmenter de 0,5 % pendant trois ans les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). . Objectif : apporter, sur cette période, 1 milliard d’euros aux Départements en difficulté. Il appartient à chaque collectivité de déclencher, ou non, le dispositif.
Un levier fiscal intéressant
Mais ce coup de pouce pourrait être un coup dur pour un autre secteur en souffrance. « C’est un chèque direct signé par les acheteurs immobiliers aux départements », analyse Séverine Amate, experte du marché. Explications. Les DTMO constituent les taxes que tout acheteur de bien immobilier doit payer, en moyenne 8% de la valeur d’achat. On les appelle généralement « frais de notaire »… À tort, puisque si cette somme est effectivement versée par l’acheteur au notaire, celui-ci n’en garde qu’une partie, le reste étant ensuite partagé entre les différentes collectivités. Y compris les conseils départementaux, pour lesquels ces DTMO constituent un levier fiscal intéressant. Par exemple, l’Hérault a reçu 288 millions d’euros en 2023, sur un budget total de 1,8 milliard d’euros.
Mais cette taxe fluctue évidemment avec la dynamique du marché immobilier et, avec la crise que traverse le secteur, elle a considérablement diminué, « une baisse de 45 millions d’euros » en 2024 a estimé cette semaine le président du conseil de l’Hérault Kléber Mesquida. La proposition de Michel Barnier vise donc à compenser ce déclin actuel. « Cette hausse de 0,5 % bénéficiera directement aux départements, qui collectent la majorité des droits de mutation. Les revenus supplémentaires serviront à financer les services publics locaux, comme l’aide sociale, les collèges ou les infrastructures. Une bouffée d’oxygène qui est censée compenser la demande du gouvernement de réduire les dépenses départementales de 2 milliards d’euros.analyse Séverine Amate. Sauf que, dit-elle, la décision pourrait avoir un impact sur le marché immobilier.
500 € supplémentaires par tranche de 100 000 € d’achat
« En moyenne, cela augmentera les frais de notaire de 500 € supplémentaires pour chaque 100 000 € d’achat. Cela peut peser sur le budget des ménages, notamment pour les primo-accédants ou ceux bénéficiant d’un apport limité. » poursuit l’expert. Ainsi pour un bien vendu 200 000 €, ces frais de notaire passeront de 15 700 € à 16 700 €. A 300 000 €, vous devrez débourser 24 200 € au lieu de 22 700 € jusque-là. Séverine Amate ajoute : « Cette augmentation constitue un fardeau supplémentaire qui s’ajoute à d’autres contraintes telles que les taux d’intérêt élevés, l’inflation et les prix immobiliers déjà élevés. Cela peut décourager certains d’acheter ou réduire leur capacité d’investissement ».
Attention, cette augmentation concerne uniquement biens immobiliers anciens. « Les biens neufs bénéficient d’un régime fiscal avantageux avec des droits de mutation très réduits (de l’ordre de 0,7 % au lieu de 5 à 6 % dans l’ancien). Les acquéreurs de biens anciens sont donc les principaux impactés et ils représentent 80% des transactions », ajoute Séverine Amate.
Quel impact sur les prix ?
Il est actuellement trop difficile d’évaluer l’impact possible sur les prix de l’immobilier. « Dans les zones où la demande reste forte (grandes villes et secteurs tendus), les prix devraient être peu impactés. En revanche, dans les zones où le marché est plus fragile, cette hausse pourrait réduire la demande et donc exercer une pression à la baisse sur les prix. conclut Séverine Amate.
Il faudra donc attendre pour voir l’impact sur le marché. Du côté des Départements, nous nous sommes dit « satisfaits ». Même si le président de l’Assemblée des Départements de France François Sauvadet avait demandé une augmentation de 1%.