M6 ose une série exigeante sur la traque des responsables des attentats du 13-Novembre
Vous avez un souvenir précis de l’endroit où vous vous trouviez le 13 novembre 2015 et de ce que vous faisiez lorsque vous avez appris les attentats qui ont ensanglanté Paris. C’est le point de départ de Espions de la terreurla mini-série lancée ce mardi sur M6. Mais l’histoire racontée dans les quatre épisodes est bien plus méconnue : la traque des responsables des attentats jihadistes et leur élimination en Syrie et sur le territoire français.
Il y a cinq ans, Franck Philippon, le créateur de cette mini-série, trouvait matière à scénario dans les écrits du journaliste Matthieu Suc, un article sur Mediapart et son livre Les espions de la terreur. Si cet ouvrage très documenté plonge le lecteur au sein de l’Amniyat, des services secrets de Daesh, des intrigues, il aborde le sujet à travers le point de vue d’agents de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et de la Direction générale de la sécurité extérieure. (DGSE).
«Nous ne soupçonnons pas à quel point les services secrets étaient en feu. Nous sommes témoins de cette cuisine intérieure. Ce qui m’intéresse, en tant que spectateur, c’est d’apprendre tout ce qui s’est passé derrière la traque des terroristes, comment elle a été organisée. On voit que même les choses qui paraissent les plus insignifiantes valent la peine d’être prises », estime Rachida Brakni, qui incarne une analyste à la DGSE.
Pour Franck Philippon, l’objectif est « d’emmener le spectateur dans un monde dont il ne connaît a priori rien » et de « rendre hommage au travail de ces agents qui, au quotidien, sacrifient leur vie dans une forme de sacerdoce, avec un engagement total et sans reconnaissance car ce sont des gens de l’ombre.
« À la frontière entre documentaire, fiction et réalisme »
Le résultat est dense, avec une intrigue cohérente, un grand nombre de protagonistes et une abondance de termes techniques. Des ingrédients ambitieux pour une mini-série « à la frontière ténue entre documentaire, fiction et réalisme », affirme le producteur Alexandre Boyer, diffusé sur une chaîne généraliste. M6 a donné son feu vert, encouragée par les très bonnes audiences enregistrées sur sa chaîne par la série Tchernobyl en 2021, avec près de 4 millions de téléspectateurs regardant chaque épisode. Cela l’a convaincue qu’il y avait un public pour ce genre de séries exigeantes.
«On s’est posé la question de savoir où placer le curseur entre ce qu’il fallait simplifier pédagogiquement tout en restant fidèle au fait que ces agents ont un langage qu’on ne comprend pas», explique le directeur. En série comme URGENCES (plein de termes médicaux), ce n’est pas un problème. On perd suffisamment le téléspectateur pour qu’il se dise qu’on ne plaisante pas et qu’il n’imagine pas que, parce qu’il comprend tout, il pourrait travailler à la DGSI. »
Protéger les sources
« Nous ne sommes pas sur un film d’action, nous parlons de réseaux, de filières. Si par moment le public – comme les acteurs ou nous-mêmes dans l’écriture – est un peu perdu, ce n’est pas grave, l’essentiel est de comprendre l’enjeu de l’épisode », appuie Matthieu Suc, qui a participé à l’écriture du scénario. Le journaliste, qui trouve de manière générale que « la fiction française est catastrophique lorsqu’elle s’adresse aux services de renseignement », estime en revanche que Les espions de la terreur « vise plutôt bien ».
« Ce que nous disons est très proche de la réalité. La DGSE et la DGSI ont lu le scénario, il n’y a eu aucune censure de leur part. Leur volonté était davantage de nous guider au cas où nous prendrions un mauvais chemin et de s’assurer que nous ne mettions personne en danger, assure Alexandre Boyer. Des modifications ont été apportées pour protéger les sources et les personnes qui existent réellement. C’est le cas de Minotaure, qui vit actuellement sous protection policière. »
Ce personnage s’inspire de plusieurs sources et notamment d’une, qui a joué un rôle très important dans la période post-13-Novembre. « Cela a permis d’empêcher deux attentats », précise le journaliste de Mediapart, qui a ajouté l’information concernant « Minotaure » dans la récente réédition de son livre de poche chez Harper Collins.
Ni « The Bureau of Legends » ni « Mission : Impossible »
Pour construire le scénario, les équipes ont pu compter sur l’expertise de Matthieu Suc, mais aussi discuter avec des agents et avoir accès à des procès-verbaux. Certaines lignes sont également tirées directement des auditions des terroristes.
« Il nous tenait à cœur de montrer les choses telles qu’elles se produisaient », insiste le réalisateur Rodolphe Tissot. Pour la scène de l’arrestation de Salah Abdeslam, les PV parlent d’un tapis rouge avec des cartons de pizzas au fond d’une cave, et bien on a filmé au fond d’une cave avec un tapis rouge et des cartons de pizza. des pizzas. Nous ne travaillons pas sur la plausibilité, comme cela peut être le cas Le Bureau des Légendesmais la réalité. C’est pourquoi les arrestations ne sont pas si spectaculaires. Les agents passent des mois à filer et à écouter, et l’arrestation a lieu en cinq minutes au coin d’une rue. Ils sont spectaculaires pour ce qu’ils disent, mais nous ne le faisons pas Mission : impossible. »