Le prix Sakharov attribué aux Vénézuéliens Machado et Urrutia, opposants à Nicolas Maduro
Youri Cortez / AFP
María Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia ont reçu ce jeudi 24 octobre le prix Sakharov, la plus haute distinction de l’Union européenne pour les droits de l’homme (photo d’illustration prise en juillet 2024 à Caracas)
POLITIQUE – Et les lauréats 2024 du Prix Sakharov sont… María Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia. Deux personnalités vénézuéliennes réputées pour leur engagement face au président, réélu en juillet, Nicolas Maduro. Ils avaient également fait campagne ensemble lors de l’élection présidentielle, remportée par le président sortant malgré des accusations unanimes de fraude. Pour « préserver sa liberté et sa vie »Urrutia, 75 ans, a révélé en septembre avoir dû quitter le Venezuela pour trouver refuge en Espagne.
« Edmundo et María ont continué à lutter pour une transition libre, juste et pacifique du pouvoir et ont défendu sans crainte les valeurs chères à des millions de Vénézuéliens et à ce Parlement : la justice, la démocratie et l’État de droit »a déclaré la présidente maltaise du Parlement européen Roberta Metsola lors de l’annonce du résultat ce jeudi 24 octobre. Avant d’ajouter : « Le Parlement se tient aux côtés du peuple vénézuélien, de María et d’Edmundo dans leur lutte pour l’avenir démocratique de leur pays. »
Avant de faire ce choix, le Parlement européen avait voté il y a quelques semaines à Strasbourg une résolution symbolique pour reconnaître Edmundo Gonzalez Urrutia comme « le président légitime et démocratiquement élu » contre Nicolas Maduro.
Un prix très politique
Au sein du Parlement, cette cérémonie de remise de prix en apparence banale s’était transformée en bras de fer. Ces derniers jours, chaque famille politique a tenté d’avancer ses pions. La droite a soutenu les deux Vénézuéliens vainqueurs. Le centre et les sociaux-démocrates ont préféré deux associations de femmes israéliennes et palestiniennes qui luttent pour obtenir la paix au Moyen-Orient. A l’annonce du résultat, ils ont déploré « une occasion manquée de promouvoir la paix et la réconciliation ». Les Verts, de leur côté, faisaient pression pour Goubad Ibadoghlou, un militant actuellement emprisonné en Azerbaïdjan. Quant au groupe La Gauche, où sont basés les rebelles, il propose de distinguer les journalistes en Palestine, qui tentent de rendre compte chaque jour de la situation à Gaza, parfois au péril de leur vie.
L’extrême droite espérait, pour la première fois depuis la création du prix en 1988, réussir à peser sur le choix final. Mais il n’a pas réussi à convaincre Elon Musk, le sulfureux patron de X et soutien très actif de Donald Trump dans la course à la Maison Blanche. Comble du cynisme : le milliardaire est en conflit ouvert avec la Commission européenne, qui pourrait imposer une très lourde amende à X pour violation de sa nouvelle réglementation. L’eurodéputé RN Thierry Mariani a défendu la candidature du multimilliardaire, expliquant qu’il participait à sa manière à « un débat véritablement libre et indépendant »tandis que le « la liberté d’expression est menacée par l’idéologie éveillée et l’islamisme fondamentaliste.
» Droits fondamentaux »
Créé en 1988, le prix Sakharov est la plus haute distinction décernée par l’Union européenne à des actions en faveur des droits de l’homme. Il tire son nom du scientifique et dissident russe Andreï Sakharov, qui a œuvré toute sa vie pour défendre les libertés civiles et a également reçu le prix Nobel de la paix en 1975.
Chaque année, le prix récompense une personnalité remarquable pour son « défense des droits de l’homme et des droits fondamentaux, notamment la liberté d’expression, la sauvegarde des droits des minorités, le respect du droit international, le développement de la démocratie et la défense de l’État de droit ». De grandes figures comme Nelson Mandela, Aung San Suu Kyi ou Alexeï Navalny l’ont remporté. En 2022, c’est le peuple ukrainien dans son ensemble qui s’est distingué pour son courage dans la lutte contre l’envahisseur russe. L’année dernière, l’Iranienne Mahsa Amini a été récompensée à titre posthume, elle qui avait été arrêtée puis tuée par la police des mœurs pour son refus de porter le voile. Le lauréat reçoit la somme de 50 000 €, remise lors d’une cérémonie généralement organisée en décembre.
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