Impôts sur les hauts revenus, postes supprimés dans l’Éducation, taxe sur l’électricité… Les points clés du projet de budget 2025 présenté par le gouvernement
Les ministres du Budget et de l’Economie ont confirmé d’autres pistes déjà évoquées, comme le report de six mois de la revalorisation annuelle des retraites.
«C’est un budget perfectible» de l’aveu même de Michel Barnier. Avec plus d’une semaine de retard sur le calendrier habituel, le gouvernement a présenté jeudi 10 octobre son projet de loi de finances pour 2025 en Conseil des ministres et à la presse. « J’ai dû le construire en deux semaines, jamais un Premier ministre n’a eu à le faire en deux semaines. Ce n’est pas possible de tout bien faire »» a défendu par avance le chef du gouvernement en marge d’un déplacement à Poitiers (Vienne).
Après un dérapage du déficit public attendu à 6,1% du PIB en 2024, le gouvernement compte le réduire à 5% en 2025. « Notre dette publique est colossale » Et « ne pas le reconnaître serait à la fois cynique et fatal », a prévenu le ministre de l’Économie, Antoine Armand. Pour y parvenir, le projet de loi de finances prévoit un effort budgétaire de 60 milliards d’euros, répartis entre 40 milliards de réductions de dépenses et 20 milliards de recettes supplémentaires. Voici ce qu’il faut retenir de ce projet.
Une contribution exceptionnelle des plus hauts revenus pendant trois ans
Les 65 000 foyers fiscaux aux revenus les plus élevés paieront davantage d’impôts pendant trois ans. Le projet de loi de finances prévoit d’introduire une contribution « sur les revenus les plus élevés, afin de garantir qu’ils soient imposés au taux minimum de 20% ». Concrètement, elle s’appliquera aux contribuables redevables de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, un impôt déjà existant payé par les ménages dont le revenu de référence dépasse 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple, comme l’explique sur le site de l’administration. Le mécanisme souhaité par le gouvernement augmenterait leur taux d’imposition total pour qu’il atteigne au moins 20 %. Cette mesure devrait permettre d’identifier deux milliards d’euros supplémentaires en 2025.
En revanche, le projet du gouvernement ne prévoit pas d’augmentation de l’impôt sur le revenu pour les autres contribuables. « Les classes moyennes, les classes populaires, les plus vulnérables d’entre nous, ne seront pas touchées »avait en outre assuré Laurent Saint-Martin, le ministre du Budget, mardi sur franceinfo. Le barème de l’impôt sur le revenu continuera d’être indexé sur l’inflation.
Fiscalité exceptionnelle pour plus de 400 grandes entreprises
Les grandes entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse le milliard d’euros en 2024 paieront un impôt supplémentaire exceptionnel sur leurs bénéfices. « C’est un effort nécessaire, mais temporaire »a expliqué Antoine Armand. Selon le ministre de l’Économie, « 440 groupes » sera affecté. Concrètement, cette mesure passera par une augmentation de l’impôt sur les sociétés, actuellement fixé à 25 %.
En 2025, ce taux d’impôt sur les sociétés sera porté à 36 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à trois milliards d’euros et à 30 % pour celles dont le chiffre d’affaires est compris entre un et trois milliards d’euros. En 2026, ces taux seront réduits respectivement à 30 % et 28 %. Cette fiscalité devrait rapporter 8 milliards d’euros de recettes l’an prochain et 4 milliards d’euros en 2026.
Par ailleurs, une taxe sur le rachat d’actions sera instaurée pour les « faire appel aux entreprises qui recourent de plus en plus à cette pratique, leur permettant de distribuer une partie de leur trésorerie excédentaire à leurs actionnaires ». Elle ciblera également les entreprises réalisant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires, et le gouvernement espère récolter 200 millions d’euros en 2025. Enfin, une fiscalité exceptionnelle est également prévue pour les entreprises de fret maritime, dont le chiffre d’affaires dépasse le milliard d’euros.
Mesures d’aide réduites ou retardées pour les entreprises
Le ministre a annoncé un report de la baisse de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). « Ce déclin va reprendre dans trois ans » a expliqué Antoine Armand. « Nous ne pouvons pas nous le permettre aujourd’hui. »estime le ministre de l’Économie. Cette décision devrait permettre de conserver 1,1 milliard de revenus l’année prochaine.
Le ministre du Budget, de son côté, promet une réforme de « aide aux entreprises » et en particulier « des baisses générales de cotisations pour inciter les employeurs à augmenter les salaires les plus bas ». Par ailleurs, les aides à l’apprentissage, dont le coût est estimé à 16 milliards d’euros par an, seront réduites. « La dynamique lancée est une belle réussite, on peut désormais ajuster le montant des primes sans freiner la dynamique »juge le ministre du Budget. Actuellement, la prime à l’embauche d’apprentis est de 6 000 euros, rappelle le site de l’administration. Enfin, le gouvernement entend supprimer « l’emploi gratuit » et réduire « l’étendue du soutien aux contrats aidés ».
Un ralentissement des dépenses et 2 200 postes en moins dans l’administration
Le gouvernement nie avoir réalisé « une cure d’austérité » mais croit qu’un « des efforts seront nécessaires » sur les dépenses de l’administration publique. « L’Etat et ses opérateurs feront 21,5 milliards d’économies »a déclaré Laurent Saint-Martin. « Pour faire mieux avec moins d’effectifs, nous proposons environ 2 200 suppressions de postes, réparties entre ministères et opérateurs de l’État »a ajouté le ministre du Budget, qui promet « des réductions ciblées » Et « des coupes non indifférenciées ».
Le texte initial du gouvernement prévoit que l’Éducation nationale perdra 2 030 emplois, ce qui en ferait, de loin, le secteur le plus touché. Dans le détail, il prévoit 4 030 postes d’enseignants en moins par rapport à 2024, principalement en maternelle et en primaire, et le recrutement de 2 000 équivalents temps plein d’intervenantes d’accompagnement des élèves en situation de handicap (AESH) à la rentrée scolaire en 2025. Une mesure justifié par « la baisse du nombre d’élèves qui devrait s’accélérer avec 97 000 élèves en moins à la rentrée 2025 »selon le ministère de l’Éducation, dont le budget reste par ailleurs stable.
En revanche, le ministre du Budget promet « des augmentations substantielles pour renforcer la souveraineté et la sécurité des Français, notamment dans la Justice et les Armées ». « Les effectifs de l’Intérieur seront également préservés »ajoute-t-il. «On adapte aussi les crédits aux besoins réels»il plaide. Certaines réductions de dépenses sont attendues, comme celle du ministère des Sports. « Le budget des sports va baisser l’année prochaine, car il n’y aura plus les dépenses connues cette année et les précédentes pour les Jeux Olympiques et Paralympiques »justifie Laurent Saint-Martin.
Point très sensible de ce projet de loi de finances, l’effort demandé aux collectivités territoriales sera « de l’ordre de 5 milliards d’euros », selon Laurent Saint-Martin.
La revalorisation des pensions de retraite repoussée de six mois
Sur le plan social, des économies d’environ 14,8 milliards d’euros sont attendues. L’année prochaine, l’augmentation des dépenses d’assurance maladie sera limitée à 2,8 %. Par ailleurs, le gouvernement compte reporter au 1er juillet la revalorisation des retraites liée à l’inflation, qui devait intervenir au 1er janvier. Ce gel temporaire devrait permettre d’économiser 3,6 milliards d’euros.
«Les autres prestations seront revalorisées selon le calendrier habituel»assure Laurent Saint-Martin. Le gouvernement table également sur une économie de 400 millions d’euros sur l’assurance chômage.
Une taxe sur l’électricité augmentée « de l’ordre de 50 euros par MWh » en février
La taxe sur l’électricité, dite TICFE, dont le montant a été réduit pendant la crise énergétique, va augmenter en février au-delà de son niveau d’avant l’instauration du bouclier tarifaire. Alors qu’il était d’environ 33 euros le MWh avant la hausse des prix de l’énergie, son niveau va être relevé vers « une fourchette autour de 50 euros par MWh », annonce le ministère de l’Économie. Son montant exact, qui ne figure pas dans le projet de loi de finances, sera fixé par décret.
Bercy assure que malgré cette hausse, la facture va baisser d’au moins 9% pour les ménages payant le tarif réglementé, soit environ 8 Français sur 10, en raison de la baisse des prix de l’électricité sur les marchés. La diminution sera d’un « centaines d’euros » en moyenne par an pour les ménages.
Toujours sur le volet énergétique, la TVA sera portée à 20 % pour l’installation d’une chaudière, contre 5,5 % ou 10 % actuellement. Une mesure qui devrait rapporter 200 millions d’euros.
Un malus plus sévère pour les véhicules les plus polluants
Le gouvernement envisage de durcir le malus automobile, qui pénalise l’achat des voitures les plus émettrices de gaz à effet de serre. À partir de 2025, il concernera les véhicules émettant plus de 113 g de CO2/km, contre 118 g de CO2/km actuellement. Ce seuil sera à nouveau abaissé en 2026 et 2027.
Par ailleurs, concernant les véhicules les plus lourds, le seuil de déclenchement du « malus de masse » sera également abaissé. À partir de 2026, cela concernera les voitures de plus de 1,5 tonne, contre 1,6 tonne aujourd’hui.
Par ailleurs, à partir de 2025, « le bénéfice de la réduction dont bénéficient aujourd’hui tous les véhicules hybrides non rechargeables sera limité aux seuls véhicules économes en énergie », ajoute le gouvernement. L’ensemble de ces mesures devraient générer 300 millions d’euros de recettes dès 2026.
Une augmentation de la taxe sur les billets d’avion
Le ministre de l’Économie a annoncé « une augmentation de la taxe sur les billets d’avion »qui comprendra des jets privés. Cette mesure ne figure pas dans le projet de loi de finances, mais fera l’objet d’un amendement du gouvernement lors de l’examen du texte au Parlement. Bercy précise que les contours de cette hausse seront définis «après concertation avec le secteur» air.
« Manque de temps »les autres mesures envisagées ne figurent pas dans le texte initial et seront également défendues par le gouvernement via des amendements. Le ministre du Budget entend notamment défendre au Parlement un « renforcement » de budget de la Justice et de l’Intérieur, ainsi que « augmenter les crédits dédiés au financement de notre patrimoine »