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Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

« Nous plantons des radis chinois, dont les racines aèrent le sol et favorisent la pénétration de l’eau. »explique Adeline de Barry, dont les vignes du Château de Saint-Martin en Provence sont directement exposées aux effets du changement climatique.

Le vigneron multiplie les initiatives pour adapter ce domaine de 100 hectares à Taradeau (Var) à ces nouvelles conditions, dont la moitié sont des vignes classées dans la prestigieuse appellation « Côtes de Provence »propriété de sa famille depuis 1740.

Elle prône une « agriculture régénératrice »fait d’un « la somme de petites actions plutôt que la recherche d’une solution unique » afin de préserver le caractère mondialement reconnu des vins de la région, notamment des rosés.

En quelques décennies, le vignoble provençal s’est imposé comme une référence dans cette couleur, avec un positionnement plutôt haut de gamme.

L’acquisition de domaines par certaines stars hollywoodiennes, comme Brad Pitt ou George Clooney, a encore renforcé cette image. Aujourd’hui, le secteur pèse entre 800 millions et un milliard d’euros selon les années. Et exporte 40% de ses volumes.

Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

Mais ce vin, associé dans l’imaginaire des consommateurs à la fraîcheur d’un apéritif d’été, est paradoxalement menacé par le changement climatique, notamment le réchauffement auquel la région méditerranéenne est particulièrement exposée, selon le GIEC, les experts climat mandatés par l’ONU.

Dans la zone AOP Côtes de Provence, la température moyenne annuelle a déjà augmenté de +1,5°C par rapport à la moyenne des années 1960-1990, selon Météo France, au-delà des objectifs de l’Accord de Paris.

Fraîcheur

« Le risque est qu’on se retrouve avec des rosés qui ne ressemblent plus aux rosés de Provence. Aujourd’hui, la Provence a un style qu’elle a rendu très populaire, ce qui nous donne ce statut de référence avec nos rosés pâles, frais et aromatiques », analyse Brice Eymard, directeur général du Conseil interprofessionnel des vins de Provence (CIVP).

Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

« Mais demain, si on a trop de changement climatique, des raisins trop concentrés, on va se retrouver avec des taux de sucre et des taux d’alcool beaucoup plus élevés. Donc beaucoup plus d’arômes confits, plus d’alcool. Et on va perdre cette fraîcheur et cette typicité. »

Un danger existentiel contre lequel la profession a lancé une « plan climat »structuré autour de la consommation d’eau, des pratiques culturales, de l’impact environnemental et des cépages.

A La Celle, commune de l’appellation Coteaux Varois en Provence, à une quarantaine de kilomètres de Taradeau, Gilles Masson et ses équipes du Centre du Rosé récoltent les premières grappes de jeunes vignes, plantées il y a quatre ans.

Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

Sur une parcelle d’un demi-hectare poussent plus de 120 nouveaux cépages, issus notamment de croisements de ceux typiques du rosé provençal, comme le Cinsault ou le Rolle et d’autres provenant de régions ou pays au climat déjà particulièrement chaud, Sicile, Grèce, Espagne…

« On en extraira peut-être les trois ou quatre cépages qui feront les rosés de demain », explique le directeur du centre de recherche, œnologue de formation et lui-même vigneron. « L’objectif est de développer des cépages résistants aux maladies et à la sécheresse »ou qui bourgeonnent plus tard, pour échapper aux gelées tardives du printemps, autre effet du changement climatique.

Vigne connectée

Les vignes sont reliées à des capteurs pour mesurer leur humidité ou la circulation de la sève, et les baies sont régulièrement testées pour leur maturité, leur sucre, leur acidité ou leur taux d’alcool.

Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

Une fois récoltés, ils sont soumis à « micro-vinifications » d’une douzaine de bouteilles maximum, afin d’évaluer leur potentiel aromatique ou chromatique.

« Nous allons essayer de produire des vins moins alcoolisés, un peu plus acides afin de conserver la fraîcheur des vins de Provence. »explique Grégori Lanza, chef de projet œnologie au Centre.

Au Château de Saint-Martin, Adeline de Barry teste également l’acclimatation de cépages siciliens, Nero d’Avola, ou grecs, Agiorgitiko, Xinomavro. Le cahier des charges de l’appellation autorise cette expérimentation et les nouveaux venus « s’amusent »elle note.

Le domaine développe également l’agroforesterie, en plantant des rangées d’arbres fruitiers, d’arbustes et de plantes dans les vignes, en plus des radis chinois et des graines de moutarde, qui « ramène beaucoup d’oligo-éléments ».

Radis chinois ou nouveaux cépages, alliés du rosé de Provence face au changement climatique

La biodiversité y gagne, le sol aussi et « il retient mieux l’eau », constate le propriétaire.

« Avec des pluies moins nombreuses mais plus violentes, c’est indispensable car sinon les sols sont lessivés ».

Mais pour planter des arbres, il faut arracher des vignes. « On perd deux rangs de vignes pour dix rangs »elle calcule. « C’est un investissement que tout le monde ne peut pas faire. Mais cela se voit dans la qualité du vin. »

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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