Crise évitée, malaise de Mbappé, Deschamps le menhir… Les leçons du retour (mitigé) des Bleus
DÉCRYPTAGE – Après sa réaction face à la Belgique (2-0) en Ligue des Nations, l’équipe de France évite les zones de turbulences. Retour sur le premier rassemblement de la saison.
Envoyé spécial à Décines
Dans les entrailles du Groupama Stadium, lundi soir, les membres de l’équipe de France n’ont pas traîné pour rejoindre l’aéroport avant de repartir chacun à la maison pour être rapidement disponibles pour leur club. Le football moderne et son rythme infernal laisse peu de place au(x) détail(s). Le cœur léger et le sourire, pour la plupart d’entre eux, les Bleus ont quitté ce rassemblement soulagés après leur victoire logique contre la Belgique (2-0) en Ligue des Nations. Trois jours après la leçon italienne (1-3) au Parc des Princes, la réaction d’orgueil a eu lieu. Pas de quoi bomber le torse au vu de la relative adversité (à part Kevin De Bruyne, le quasi-rien), mais suffisamment pour retrouver le sourire. Et sortir de la zone de turbulences. Bilan d’un rendement moyen.
Les Bleus évitent la crise
Au Parc des Princes vendredi dernier, le public n’a pas reconnu l’équipe de France, scindée en deux, dénuée de toute revendication et menée par des individus qui ont oublié que le football reste avant tout un sport d’équipe. Mike Maignan a même fustigé dans le vestiaire un comportement de pseudo-stars que ne sont pas la plupart des internationaux présents à ce rassemblement (5 champions du monde dans le groupe des 23). Lundi à Décines, dans un Groupama Stadium loin d’être plein, signe d’un début de désintérêt pour ces Bleus ennuyeux à l’Euro, le sursaut d’orgueil, avec huit changements entre les deux matches, a existé.
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A l’image de Kolo Muani, auteur de l’ouverture du score, pas forcément le footballeur le plus brillant mais assurément l’un des plus travailleurs (meilleur buteur des Bleus en 2024 avec 4 buts), ou de Dembélé, Koné, Kanté, Koundé, Digne, Saliba, l’exigence était visible. Le goût de l’effort aussi. Le ciment de toutes les équipes de Deschamps. Cette victoire a le mérite d’éviter la crise après le revers contre l’Espagne en juillet et l’Italie à la rentrée, même si elle n’enlève rien aux projets qui s’annoncent pour les Bleus.
Mbappé et Griezmann, le mal-être
On avait laissé le capitaine et le vice-capitaine en juillet dernier épuisés à tous les niveaux après un Euro raté. Le public français les a trouvés très loin de leur niveau en septembre. Grands absents face à l’Italie, ils ont pris place sur le banc des remplaçants lundi soir avant de s’aérer en seconde période pour aller chercher une autre sélection (Antoine Griezmann, 137 sélections, rejoint Olivier Giroud au rang de 3e joueur français le plus capé de l’histoire). Sur le terrain, Mbappé, aligné en numéro 9, a erré contre l’Italie, sans énergie et sans idées. Même chose pour Griezmann, remis au centre, orphelin de Giroud et jamais au diapason.
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Au-delà du jeu, l’attitude du capitaine de l’équipe de France pose question. Sa conférence de presse lunaire dimanche, où il est apparu blasé et détaché, a fait sourciller jusque dans l’interne. Même chose pour son attitude avec ses coéquipiers, là où il est censé guider ses troupes. Personne ne l’a vu exister dans ce rôle lors de cette séquence. Comme s’il était ailleurs. Plus préoccupé par le Real Madrid que par la sélection. Le staff l’a remarqué. Ses coéquipiers aussi. Quand il fait gagner les Bleus, ses privilèges particuliers sont acceptés. Quand il est autant en difficulté, ils ont du mal à passer au travers dans le vestiaire. À lui de changer de braquet. Vite.
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Deschamps reste fidèle à son cap
À son retour sur la Côte d’Azur mardi, le sélectionneur de 55 ans a dû retrouver son équipe avec un esprit plus léger. Non pas qu’il ait paniqué ou montré des signes de stress lors de cette séquence, mais la victoire dans le Rhône lui offre un peu de répit, lui qui s’est fait huer par une partie du public avant le match. Une première depuis sa prise de fonction en 2012. Après l’Euro, et en voyant ses deux meilleurs joueurs totalement cramés, tout en se projetant sur la saison à venir avec ses calendriers bien chargés (plus de matches de Ligue des champions, Coupe du monde des clubs l’été prochain), il s’est vite convaincu d’une chose. Les séquences de septembre-octobre-novembre, liées à la Ligue des Nations, doivent servir de laboratoire pour voir de nouveaux joueurs, donner un peu de répit à certains et donner de l’air au groupe France. Une politique censée apporter d’autres solutions en vue de 2026. Quitte à « faire des erreurs »aller à l’encontre de l’expression collective« , comme il l’a rappelé cette semaine.
Cela n’a pas fonctionné contre l’Italie, avec une équipe scindée en deux et parfois des sénateurs entrevus sur le terrain, cela a été plus cohérent contre la Belgique. Le réservoir français permet aussi à Deschamps de se consacrer à son nouveau rôle de technicien de laboratoire. Demander à Dominico Tedesco, critiqué en Belgique et dont l’avenir international de Kevin De Bruyne occupait tous les esprits après la défaite, de faire pareil avec les Diables Rouges… Ce serait du suicide. Sans Pavard, Tchouaméni, Camavinga, Rabiot ou encore Coman et bien sûr Giroud à la retraite, le patron des Bleus a pu mener à bien sa grande revue d’effectif. Pas forcément toujours agréable à voir, avec une complémentarité parfois inexistante, mais cette vision à moyen terme, avec un groupe qui sera resserré pour les qualifications au Mondial 2026, doit compter dans les mois à venir. Malgré le début de tempête et les sifflets, le menhir Deschamps reste solide.
Les nouveaux sont datés
La rentrée est synonyme de nouveautés et à ce petit jeu, l’histoire de l’équipe de France a vu trois recrues décrocher leur première sélection. Le plus en vue, Manu Koné, entré en jeu lors du match contre l’Italie et titulaire contre la Belgique, a fait ses preuves. Il aurait pu sombrer après un début de match catastrophique (perte de balle, carton jaune à la 4e minute)et (1 minute), mais au contraire, le milieu argenté des JO a fait preuve de caractère. Pour finalement gagner en confiance et en profondeur tout au long du match, terminant meilleur joueur du milieu de terrain français. A 23 ans, le natif de Colombes a marqué des points, face à la concurrence d’un Youssouf Fofana décevant notamment. Avec les retours attendus de Tchouaméni, Rabiot (un doute entoure celui de Camavinga, touché au genou) en octobre, le joueur formé à Toulouse peut y croire. C’est déjà une victoire.
L’attraction de ce rassemblement, Michael Olise (22 ans) demande à être revu. Titulaire vendredi sur le côté droit dans une équipe peu habillée, il a laissé entrevoir sa créativité et son sens du jeu du pied gauche. Les Bleus en ont besoin, encore plus au vu des difficultés de Griezmann. Si son entrée en jeu pendant 17 minutes au Groupama Stadium n’a pas captivé grand monde, le Munichois était là pour trouver ses marques, découvrir le groupe et le fonctionnement du staff… qui n’en a pas manqué une miette, désireux de mieux connaître un élément encensé par Thierry Henry. Sauf blessure, il sera là en octobre. Ce sera plus dur pour Loïc Badé, blessé et qui a dû déclarer forfait, dans un secteur du jeu où la concurrence est rude (Pavard, Fofana, Lukeba, Yoro…). Si Deschamps suit son raisonnement, et il n’y a aucune raison que ce ne soit pas le cas, d’autres joueurs découvriront la sélection en octobre (les 10 et 14) pour les matches contre Israël et la Belgique. Le début de la Ligue des Champions, avec de nombreux joueurs français impliqués, sera suivi avec attention par le staff.