Le sport collectif français paie le prix de son manque de professionnalisme
Parmi les différentes équipes françaises engagées dans les sports collectifs aux Jeux paralympiques de Paris, seule l’équipe de cécifoot a remporté une médaille. Les autres ont subi des défaites souvent lourdes.
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Les sports collectifs ont été une source importante de médailles pour la délégation française aux Jeux olympiques, mais ils l’ont été beaucoup moins aux Jeux paralympiques. Cela s’explique par le manque d’expérience des équipes non professionnelles qui ont eu du mal à se réunir pour s’entraîner. Dans ce contexte, la finale atteinte par l’équipe de France de cécifoot face à l’Argentine, samedi 7 septembre, a presque ressemblé à un exploit.
« On prend congé de nos vacances et de notre travail pour se retrouver, on s’entraîne 45 jours par an. Le Brésil, c’est trois ou quatre mois par an. Et pourtant, on est en finale des Jeux, à la maison, c’est magnifique »C’est ce qu’a déclaré Frédéric Villeroux, le capitaine de l’équipe de France de cécifoot après la victoire en demi-finale contre la Colombie (1-0). Pour décrocher l’or, un nouveau défi attend les Bleus face aux Argentins, qui vivent de leur pratique sportive.
Toutes les autres équipes françaises de sports collectifs n’ont pas réussi à relever le défi de battre les professionnels. « Nous avons quarante ans de retard sur nos adversaires »regrette Dominique Duvivier, sélectionneur de l’équipe de France masculine de volley-ball assis, classée 23e mondiale et invitée en tant que pays hôte. Lors de la création du collectif en 2017, « Nous sommes partis de zéro : pas d’athlètes, pas d’entraîneur, pas d’arbitre, pas de classificateur formé. Nous avons collaboré avec le Comité paralympique français qui nous a aidés à recruter. Nous avons développé des contacts avec des maisons de retraite, du bouche-à-oreille et un partenariat avec l’armée pour trouver des personnes blessées et donc éligibles. »explique Axelle Guiguet, directrice technique nationale de la Fédération Française de Volley-ball.
Les volleyeurs français n’ont disputé leur première Coupe du monde que l’année dernière.Cela nous a permis de jouer contre des équipes africaines, asiatiques et américaines, c’était une première. »poursuit Dominique Duvivier. Avec ce manque d’expérience, elles ont donc logiquement terminé huitièmes et dernières des Jeux paralympiques, à l’image de leurs homologues féminines, pour qui la tâche était encore plus compliquée. L’équipe de France féminine de volley-ball assis n’a été créée qu’en 2019, juste avant la pandémie de Covid-19 qui ne l’a pas arrangée.
« On est au niveau zéro, à des années-lumière de pouvoir concourir. Dans l’équipe, une seule joueuse avait joué au volley debout avant de se lancer dans le volley assis. Certaines étaient sportives, mais pas toutes. On ne peut pas être sûr d’un développement physique optimal. Ce sont des mères de famille, réparties dans tout le pays, c’est déjà un mini exploit de les réunir deux jours et demi par mois. »commente Yohann Escala, leur entraîneur.
Ce sentiment d’impuissance est partagé par l’entraîneur de l’équipe de France féminine de goalball, présente pour la première fois aux Jeux. « Nous sommes au niveau régional et nous jouons contre des professionnelsrésume Anthony Puaud sur le site Les Sportives. Nos joueuses ont commencé à jouer au goalball il y a trois ans, contre des femmes chinoises qui vivent ensemble tous les jours et qui sont professionnelles. » Les Bleus terminent ainsi huitièmes et derniers également, avec plusieurs défaites par dix buts d’écart.
Dans les onze disciplines paralympiques sous l’égide de la Fédération Paralympique Française, « il n’y a pas de professionnels »« C’est un grand plaisir de voir des joueurs de tous horizons, et nous avons hâte de les voir jouer », reconnaît Sébastien Munos, responsable des licences et des affiliations et consultant de France Télévisions sur le cécifoot. Parmi les finalistes paralympiques figurent également dans leurs rangs un kiné, un informaticien, un journaliste, un avocat, un réceptionniste, un musicien ou encore un éducateur sportif. « Mais cette année, des ressources vraiment importantes ont été débloquées par l’ANS (Agence Nationale des Sports) pour libérer des joueurs avec, par exemple, un contrat de cent jours. Et de nombreuses entreprises jouent le jeu et mettent des joueurs à disposition »il continue.
Au sein de l’équipe de France de basket-ball en fauteuil roulant, qui participait aux Jeux paralympiques pour la première fois depuis 2004, l’entraîneur, Franck Bornerand, est lui-même employé de banque. Une situation qui contraste avec le professionnalisme des pays voisins, comme l’Italie, l’Espagne ou la Grande-Bretagne. « J’ai passé quelques saisons en Italie et on était payé pour s’entraîner deux fois par jour et jouer des matchs. Cela change beaucoup de choses. En France, beaucoup de joueurs travaillent à côté, on ne peut pas leur demander autant d’entraînement, ils ont une vie de famille », explique Sofyane Mehiaoui.
Tout le monde espère que les Jeux paralympiques permettront de structurer davantage leur discipline en France, d’attirer de nouveaux participants, et que les moyens alloués par l’ANS ne diminueront pas. « Il n’y a pas de secret, j’espère que nous conserverons ce financement comme héritage après les Jeux »affirme Sébastien Munos. Avec un risque, sinon, de retour en arrière. « Nous ne devons pas faire une un coup sur ces Jeux et ne rien faire de plus, comme ce fut le cas de la Grande-Bretagne, qui a fait de grands Jeux en 2012 à Londres, mais qui a ensuite coupé la discipline »se souvient Dominique Duvivier, sélectionneur de l’équipe de France de volley-ball assis. Résultat : non-qualification pour les Jeux de Paris, douze ans plus tard.