Dans l’industrie allemande, le rapport à la Chine est à un point de bascule
Lorsque le chancelier allemand Olaf Scholz s’est envolé pour la Chine samedi 13 avril, rien n’était apparemment très différent des nombreux voyages effectués dans ce pays, par sa prédécesseure Angela Merkel, au cours de la décennie 2010, où l’Allemagne y a fait tant d’argent. L’avion du gouvernement transportait des représentants de grands groupes allemands, au premier rang desquels Oliver Blume, patron de Volkswagen, la plus grande entreprise allemande, qui vend quatre voitures sur dix en Chine.
Mais les relations entre Berlin et Pékin ont fondamentalement changé. En juillet 2023, l’Allemagne a adopté une « Stratégie chinoise », qui recommande aux entreprises de diversifier leurs sources d’approvisionnement et leurs clients face à la montée des risques géopolitiques. A Bruxelles, à Washington, mais aussi au sein de la coalition allemande, la pression est forte sur la chancelière pour qu’elle adopte une position plus ferme vis-à-vis de la Chine. Alors que l’Allemagne souffre d’un ralentissement économique et que son industrie peut difficilement se passer des commandes chinoises, Olaf Scholz doit trouver un nouvel équilibre.
La tâche sera d’autant plus délicate que les fissures se sont creusées au sein même de l’industrie allemande. Contrairement aux années 2010, le fort consensus qui régnait sur la question chinoise entre l’industrie, les syndicats et la politique s’est estompé. Un fossé s’est creusé entre les grands groupes, qui produisent de plus en plus en Chine, et les entreprises de taille moyenne, pour qui le rapport entre profits et risques posés par le marché chinois n’est plus aussi favorable.
« De nombreuses PME craignent de perdre la technologie dans laquelle elles sont à l’avant-garde mondiale si elles produisent en Chine et préfèrent y exporter. Mais l’accès au marché leur est devenu de plus en plus difficile. C’est pourquoi ils ont accueilli favorablement la recommandation du gouvernement de dérisquerdiversifier les sources et les débouchés de manière plus offensive que les grandes entreprises », explique Rolf J. Langhammer, expert commercial à l’Institut pour l’économie mondiale de Kiel. Une enquête de l’institut Ifo, publiée jeudi 11 avril, constate que seulement 37% des entreprises allemandes déclarent encore dépendre des produits chinois pour leurs approvisionnements décisifs, contre 46% en février 2022.
Plusieurs plans sociaux d’envergure
Cette divergence d’intérêts entre PME et grands industriels, longtemps limitée à une discussion au sein des milieux d’affaires, a pris ces derniers mois une dimension bien plus politique. Alors que les groupes automobiles et leurs grands sous-traitants (Bosch, ZF, Continental) subissent les contrecoups du ralentissement des ventes de véhicules électriques, ils ont annoncé plusieurs plans sociaux d’envergure outre-Rhin…, en même temps qu’un des investissements d’accélération en Chine, le plus grand marché automobile mondial.
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