après la Russie, la France envisage « sérieusement » de construire un site de conversion et d’enrichissement de l’uranium de retraitement
Les sanctions contre la Russie bouleversent la donne dans le secteur nucléaire. Le gouvernement français examine ainsi « sérieusement » possibilité de construire « En France » un site de conversion et d’enrichissement de l’uranium retraité, même si jusqu’à présent la Russie est le seul pays au monde à disposer d’une usine de conversion de cet uranium recyclé destiné à être intégré dans des centrales nucléaires.
» La possibilité de réaliser un projet industriel de valorisation de l’uranium retraité (ou recyclé, ndlr) en France est sérieusement étudiée, sous l’égide du conseil de politique nucléaire. « , a indiqué jeudi soir à l’AFP le ministère de l’Industrie et de l’Énergie.
Le ministère a confirmé les déclarations au journal Le monde dans un article consacré aux échanges commerciaux de la France avec l’industrie nucléaire russe, un secteur qui, contrairement au pétrole, échappe toujours aux sanctions internationales imposées après l’invasion de l’Ukraine. » Les conditions associées sont encore à l’étude », a précisé le ministère.
Moins de dépendance au mastodonte russe Rosatom
L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 a mis en évidence pour la France et d’autres pays comme les États-Unis la nécessité de moins dépendre du mastodonte russe Rosatom pour le cycle du combustible des centrales nucléaires. Dans ce cas, pour convertir son uranium de retraitement (URT), la France n’a d’autre choix que de réaliser cette étape en Russie, seul pays à disposer, via son opérateur public Rosatom, d’une usine de conversion. pour cette URT. La prochaine étape d’enrichissement peut être réalisée en Russie ou aux Pays-Bas.
L’ONG écologiste Greenpeace a dénoncé ces derniers mois la poursuite des livraisons d’uranium entre la Russie et la France, notamment au profit des centrales EDF, malgré la guerre. EDF est en effet lié à un contrat de 600 millions d’euros conclu en 2018 avec Tenex, filiale de Rosatom, pour recycler et enrichir l’uranium issu du retraitement du combustible usé du groupe français.
EDF a toujours affirmé respecter ses « engagements contractuels » avec Tenex en postulant « strictement toutes les sanctions internationales » et les restrictions commerciales vis-à-vis de la Russie. Interrogé jeudi sur ce contrat lors d’un congrès de la Société française de l’énergie nucléaire (SFEN), Jean-Michel Quilichini, directeur de la division combustible nucléaire à EDF, a expliqué à Monde qu’EDF continuerait à « honorer le contrat « . Contacté par l’AFP, le groupe souligne qu’il » maximise la diversification de ses sources géographiques et de ses fournisseurs », sans toutefois préciser la partie de ses approvisionnements en URT enrichi provenant de Russie.
L’option de construire un site d’enrichissement et de conversion de l’uranium recyclé avait déjà été évoquée par le gouvernement en novembre dans son document » Stratégie française pour l’énergie et le climat » (SFEC), dans lequel il évoque la mise en œuvre « d’un secteur industriel européen « . De son côté, EDF indique à l’AFP qu’elle discute » avec plusieurs partenaires pour construire une usine de conversion et de retraitement de l’uranium en Europe occidentale d’ici 2030 « .
Issu du traitement du carburant, l’URT peut être réutilisé pour produire du nouveau carburant après avoir été converti puis réenrichi. Le 5 février 2024, pour la première fois depuis dix ans, un réacteur de la centrale de Cruas (Ardèche) a redémarré avec « lune première recharge d’uranium entièrement recyclé », a annoncé EDF sur le réseau social LinkedIn.
Vinci Construction remporte le contrat de génie civil pour l’extension de l’usine d’enrichissement d’uranium d’Orano
De son côté, Vinci Construction a annoncé jeudi avoir remporté le contrat de génie civil pour l’extension de l’usine d’enrichissement d’uranium d’Orano (ex-Areva) qui doit permettre d’augmenter ses capacités de 30% pour aider les clients électriques du monde entier à dépendre moins sur le carburant en provenance de Russie.
Le spécialiste français du cycle du combustible Orano » attribué au groupement composé de Dodin Campenon Bernard (mandataire) et Campenon Bernard Centre-Est, filiales de VIinci Construction, le lot génie civil et gros œuvre du contrat d’extension de l’usine d’enrichissement d’uranium Georges Besse 2 Nord, sur le site du Tricastin ( Drôme) », a annoncé le groupe de BTP dans un communiqué.
Ces travaux de génie civil et de gros œuvre pour un montant de « plusieurs dizaines de millions d’euros » ajouterai » deux nouvelles tranches (…) aux trois tranches existantes déjà réalisées par Vinci Construction il y a une dizaine d’années » a déclaré le groupe.
» Les travaux, qui mobiliseront plus de 170 personnes en pleine activité, débuteront à l’été 2024 pour 32 mois, dont 25 mois d’opérations de génie civil avec la mise en œuvre de 35 000 m3 de béton, 4 500 t d’armatures et 500 plots antisismiques. », a détaillé Vinci Construction.
D’un montant d’investissement de 1,7 milliard d’euros, l’extension de la centrale Georges-Besse II inaugurée en 2011 sur le complexe nucléaire du Tricastin est un projet crucial pour Orano. Objectif : augmenter de 30 % ses capacités d’uranium enrichi, dans un contexte où, selon Orano, les exploitants nucléaires recherchent une plus grande indépendance vis-à-vis de la Russie. » Avec cette extension de capacité, l’uranium produit sur le site d’Orano Tricastin pourra alimenter l’équivalent de 120 millions de foyers par an en énergie bas carbone. », expliquait en octobre Orano, qui vise une première production de l’extension en 2028.
Le marché de l’uranium ne compte actuellement que quatre acteurs. enrichisseurs » dans le monde : le russe Rosatom (43 %), premier exportateur, le groupe européen Urenco (31 %), le chinois CNNC qui dessert son marché intérieur, et Orano (12 %).
(Avec l’AFP)