Les mécanismes de la synesthésie des sous-titres décryptés
Comme beaucoup de personnes dans sa situation, Caroline Andrieu a découvert cette particularité du fonctionnement de son cerveau assez tard, vers 45 ans. « J’avais l’habitude de penser que tout le monde pouvait voir les mots prononcés dans les sous-titres défiler dans sa tête, tout comme moi. »explique cette journaliste de la presse écrite parisienne. C’est en rédigeant un article qui faisait état de cette intrigante faculté du cerveau, en 2018, qu’elle en a pris conscience.
Transcrire automatiquement les mots parlés en mots écrits, une propriété cérébrale qui vient de loin. « Avant même d’apprendre à lire, je me souviens que lorsque j’écoutais quelqu’un parler, je voyais un gribouillage furieux écrit dans ma tête. Je me sentais privée d’un outil pour comprendre ce que j’entendais, ce qui créait en moi un sentiment de profonde insécurité.elle dit.. Quand j’ai appris à lire, tout est devenu clair d’un coup.
Caroline a une forme particulière de synesthésie (du grec synonyme pour « union », et esthésiepour « sensation »), un état neurologique qui n’a rien de pathologique. Le cerveau des synesthètes associe automatiquement différentes modalités sensorielles. Par exemple, une couleur à un son ou à un chiffre : pour certains, A est toujours rouge ; pour d’autres, 8 est coloré en bleu et pour d’autres encore, en rouge… La proportion de synesthètes, toutes formes confondues, est estimée à quelques pourcents – il est difficile d’être plus précis.
Caroline, de son côté, souffre de synesthésie des sous-titres. Lorsque quelqu’un lui parle au téléphone, les sous-titres sont écrits dans une police différente de celle utilisée lorsque l’interlocuteur est en face d’elle. Lorsque quelqu’un parle fort, « c’est écrit plus grand »dit-elle. Est-ce qu’il baisse ou élève la voix ? « Cela fait des vagues. » Entend-elle du chinois, une langue qu’elle ne comprend pas ? Elle voit une série de n toujours en italique « .
Un phénomène peu étudié
Dès 1883, l’anthropologue Francis Galton (un cousin de Darwin) décrivait cette capacité à « quelques personnes voient mentalement imprimé chaque mot prononcé »Depuis, le phénomène est resté très peu étudié.
Mais en 2015, un jeune retraité a fait bouger les choses. « J’ai contacté Laurent Cohen, neuroscientifique à l’Institut du Cerveau à Paris, car je pensais que mon cas pourrait l’intéresser. », dit François Le Chevalier. Dès qu’on lui parle, il parle aux autres ou imagine des dialogues« ça s’écrit tout seul » dans sa tête, « avec les mêmes fautes d’orthographe (qu’il fait) Parfois « . Le phénomène lui semble « tellement naturel » qu’il croyait aussi, jusqu’à ses 60 ans, que tout le monde travaillait comme ça.
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