Guerre en Ukraine : pour la Russie, les morts coûtent autant que les vivants
La capacité de la Russie à financer sa guerre contre l’Ukraine pourrait bien déterminer l’issue du conflit. Après plus de deux ans de combats sur une ligne de front de plus en plus statique, l’épuisement des deux camps et leur capacité à poursuivre le conflit seront des facteurs clés dans leur volonté de parvenir à un accord de paix.
De plus, les dépenses de Moscou pour prolonger son effort de guerre ont atteint des niveaux stupéfiants : selon Re:Russia, une plateforme gérée par des scientifiques et universitaires russes en exil, l’équivalent de 1,5 % du PIB du pays a été dépensé en un an pour les salaires des soldats et les indemnisations en cas de blessures ou de décès.
Une estimation basée sur la taille de l’armée russe
La somme évoquée par Re:Russia atteindrait entre 2,75 et 3 000 milliards de roubles (28,7 et 31,3 milliards d’euros) entre juillet 2023 et juin 2024. Elle se répartit entre les paiements dus aux contrats avec les militaires, qui varieraient de 16,2 à 18,8 milliards d’euros, et les sommes versées aux blessés, handicapés et décédés et à leurs familles. Ces sommes correspondent à environ 1,5 % du PIB de la Russie, estimé à 2 020 milliards de dollars en 2023 selon la Banque mondiale, et entre 7,5 et 8,2 % du budget fédéral, dont le total a explosé pour couvrir les dépenses militaires.
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L’analyse se fonde sur une estimation de la taille de l’armée russe, dont on ignore l’ampleur exacte. Selon le Royal United Services Institute, un groupe de réflexion britannique, Moscou comptait environ 470 000 soldats dans ses rangs en Ukraine en février.
Mais 2024 devrait être une année de recrutement majeure, selon Re:Russia, qui souligne que 30 000 personnes sont recrutées dans l’armée russe chaque mois, selon les services de renseignement étrangers. En juin 2024, Vladimir Poutine s’est vanté que Moscou déploierait près de 700 000 hommes. Dmitri Medvedev, ancien président russe et vice-président du Conseil de sécurité russe, a annoncé le 4 juillet que 190 000 contrats avec l’armée russe avaient été signés en 2024. Sur la base de ces différentes estimations, Re:Russia conclut que l’armée russe compte entre 500 000 et 600 000 hommes.
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Plus de 1% de la main d’oeuvre russe est enrôlée
L’estimation des pertes est également un exercice complexe. Au 19 juillet 2024, Mediazona et la BBC ont pu dénombrer 59 725 soldats morts depuis le début de la guerre, en se basant sur les annonces officielles, les mentions sur les réseaux sociaux et les informations de la presse locale. Ce chiffre ne comprend que les soldats dont le décès est certifié, le nombre réel est donc forcément bien plus important, sans compter les blessés.
Dans une autre enquête, Meduza et Mediazona estiment à 120 000 le nombre de Russes morts pendant le conflit, en utilisant le registre des héritages russes. En mai, Stéphane Séjourne, le ministre français des Affaires étrangères, donnait à Novaïa Gazeta le chiffre de 150 000 morts dans l’armée russe et de 350 000 blessés.
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En combinant les estimations des Russes mobilisés, blessés et tués depuis février 2022, Re:Russia arrive au chiffre d’un million de personnes ayant servi dans l’armée russe, soit 1,3 % de la population active. Cependant, une part substantielle de la population travaille également au service de l’effort de guerre, en plus de ces centaines de milliers d’hommes sur le front.
L’économie russe est en pleine métamorphose depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, cherchant à produire en masse les équipements nécessaires à une future victoire, tout en peinant à trouver de nouveaux marchés pour ses exportations et à contourner les vastes sanctions occidentales. Ces énormes paiements qui pèsent sur le budget de l’État ne sont donc que la pointe de l’iceberg, Moscou concentrant l’essentiel de ses efforts et de ses ressources sur l’objectif de gagner un conflit bien plus long que prévu.