La NASA veut faire s’écraser l’ISS sur Terre, mais des voix s’y opposent
C’était prévu depuis longtemps. En 2031, nous dirons adieu à la Station spatiale internationale (ISS), qui finira sa vie en s’écrasant dans l’océan Pacifique après avoir quitté son orbite. Ce destin funeste a un coût, mais il semble indispensable en raison de l’obsolescence de la station. Pourtant, parmi les experts, des voix s’élèvent pour réclamer une modification du plan initial.
Parmi ceux qui protestent contre la destruction de l’ISS figure Jean-Jacques Dordain, qui fut le directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA) entre 2003 et 2015. Interviewé par le magazine américain Forbes, il affirme que cela reviendrait à priver les citoyens de l’avenir de l’une des créations technologiques les plus importantes de l’histoire de notre civilisation. Le Français appelle désormais à revenir sur cette décision.
Selon le plan initial, la Station spatiale internationale devait être envoyée dans les eaux de l’océan Atlantique. Finalement, c’est le Pacifique qui a été retenu et son fameux point Nemo que nous avons présenté en 2022. Alors pourquoi ne pas changer une fois de plus d’option ? Jean-Jacques Dordain propose de propulser l’ISS sur une orbite plus haute, afin que la station soit maintenue dans l’espace. Il croit tellement à cette idée qu’il s’est même associé à Michael Griffin, ancien administrateur de la NASA (2005-2009), pour signer une demande officielle de « pardon ».
Mêmes coûts, même système
Les deux hommes, qui ont collaboré en leur temps à la construction de l’ISS, ont adressé leur missive aux cinq grandes agences spatiales qui travaillent main dans la main depuis tant d’années sur la station. Mais elle est aussi destinée aux milliards de citoyens de notre planète, à qui ils voudraient donner le choix. Ils demandent que l’ISS soit « transmis aux générations futures et soumis à leur décision ».
Ironiquement, souligne Forbes, le plan de destruction de la station a été en partie élaboré par William Gerstenmaier, directeur du programme ISS entre 2002 et 2005. Il est aujourd’hui consultant pour SpaceX, qui est précisément l’entreprise choisie par la NASA pour produire l’appareil qui permettra de désorbiter l’ISS et de la plonger dans l’océan Pacifique. Le coût de la facture pour l’agence américaine : 843 millions de dollars, soit environ 771 millions d’euros.
Changer de stratégie reviendrait-il à rompre le contrat entre la Nasa et SpaceX ? Absolument pas, selon Jean-Jacques Dordain et Michael Griffin : le système mis en place pour sortir l’ISS de son orbite avant de la précipiter dans les eaux terrestres pourrait au contraire servir à la placer sur une orbite plus haute où elle resterait, tel un monument, pour les générations futures. Remettre en question la manière de démanteler la station spatiale ne représenterait donc pas un enjeu financier.
« Déplacer l’ISS de son altitude actuelle de 400 kilomètres à une orbite de 800 kilomètres nécessiterait une poussée d’environ 220 mètres par seconde, à peu près la même que celle requise pour une désorbitation contrôlée. »« Nous sommes très engagés dans cette cause », expliquent les deux hommes dans leur lettre ouverte publiée par SpaceNews. Ils bénéficient du soutien d’autres personnalités du milieu, comme Rick Tumlinson, présenté comme un activiste du monde de la conquête spatiale, qui appelle les agences japonaise et canadienne à se joindre à ce combat et ne ferme pas la porte à un travail conjoint avec la Russie.