Divertissement

100 000 personnes se rendent au festival électro Tomorrowland

A partir d’aujourd’hui et pendant deux week-ends, le festival de musique électronique Tomorrowland accueillera 400 000 personnes venues du monde entier. A l’échelle internationale, la renommée de ce festival égalerait presque celle du footballeur Kevin De Bruyne ou du roi Philippe de Belgique. «  Tomorrowland est un énorme succès : quand on est Belge et qu’on voyage à l’étranger, la première chose dont on entend parler, avant la bière et le foot, c’est Tomorrowland.déclare Louis Collinet, fondateur et directeur de Tapio, une plateforme de conseil en stratégie climatique basée à Bruxelles. Le côté négatif est que les gens viennent de loin pour venir. »

Environ 10 000 festivaliers arrivent par avion, via des offres groupées proposées par les organisateurs. Pire encore : selon Tapio, environ 100 000 personnes arrivent par avion. Cela fait de Tomorrowland le festival le plus polluant de Belgique. «  D’après les estimations faites – complètement indépendamment du festival – il s’agit de 370 kilos de CO2 par un festivalier. » Une hypothèse basse. À titre de comparaison, selon le rapport Décarbonons la culture du Shift Project publié en 2021, les spectateurs des Vieilles Charrues rejettent 50 kg de CO2. «  Si nous allons à Tomorrowland, je ne serais pas étonné que les festivaliers pensent qu’ils assistent à un festival durable, car des efforts sont faits en matière de recyclage. C’est un peu la définition du greenwashing : une stratégie de communication »juge Louis Collinet.

Contactée, l’organisation du festival a fait référence à une brochure indiquant que 46 000 festivaliers européens viennent à Tomorrowland en voyage de groupe, en avion ou en train.

Les transports, premier polluant

La mobilité représente, selon le rapport Tapio, 79 % des émissions du festival. «  À partir du moment où les gens viennent de l’autre bout du monde, cela entre en contradiction avec la notion de sobriété. « , explique Louis Collinet. Pourtant, les études convergent sur un constat : le transport est – de loin – le poste le plus polluant de tous les festivals belges.

Fondateur du festival de Dour, Carlo Di Antonio – également bourgmestre de la ville et ancien ministre wallon (Les Engagés, centre-droit) de la Transition écologique – ne nie pas le problème. «  Nous avons des bus qui viennent de Bordeaux, de Marseille que nous avons du mal à remplir, alors qu’il y a 100 voitures qui viennent de Marseille.il se plaint, plaidant pour une dissuasion financière. «  Notre point faible est que le stationnement est gratuit. Il faut rendre la voiture moins attractive et financer des déplacements en bus abordables avec les revenus du stationnement, c’est ce que je vais proposer (à l’équipe). »

«  Notre point faible est que le stationnement est gratuit. »

Mais tout ne repose pas sur les épaules des festivaliers. Il faut aussi faire venir sur place des milliers de bénévoles, sans compter les artistes qui s’y produisent. Amener Metallica ou Nicki Minaj à Bruxelles ou à Liège, c’est faire exploser l’empreinte carbone. «  Il est difficile de se définir comme un festival durable sans faire des choix violents (comme renoncer à programmer des stars internationales). Il va falloir faire des choix, et emmener son public avec vous dans ces choix. »croit Louis Collinet.

Les gobelets lavables suscitent la controverse

Outre l’empreinte carbone, la pollution plastique est un enjeu majeur. Les festivals belges sont agités par la polémique autour de l’obligation d’utiliser uniquement des gobelets réutilisables : Tomorrowland a refusé, et pourrait payer une amende de 500 000 euros par jour. L’équipe, interrogée sur ce sujet, nous a simplement renvoyé vers un rapport interne sur le développement durable. Son refus s’explique par «  L’utilisation de gobelets réutilisables pose trop de problèmes opérationnels, pratiques et logistiques. Mais surtout, elle n’a aucune vertu environnementale. » Le festival avait demandé une dérogation pour écouler ses stocks de gobelets jetables, dérogation refusée par le gouvernement flamand.

A Dour, la loi a été appliquée, mais les arguments sont les mêmes : les gobelets lavables n’ont aucune vertu écologique. «  Un gobelet réutilisable représente 10 ou 12 fois plus de plastique qu’un gobelet jetable, mais on n’arrive jamais à l’utiliser 10 ou 12 foisCarlo Di Antonio couine. Nous utilisons un million de tasses, car ils ne peuvent pas les nettoyer ici, il y a 150 km pour aller à Anvers, pour les laver et les sécher… »


Le festival de Dour est passé aux gobelets jetables, même s’il estime qu’ils n’ont aucune vertu écologique.
Flickr / CC PARNCND 2.0 / Olivier Bourgi

Sous-utilisés, ils sont en réalité plus polluants. Selon le collectif R2D2Pour aider les festivals français à réduire au maximum leurs déchets plastiques, la meilleure option reste les gobelets en plastique réutilisables, à condition de les utiliser au moins quinze fois. Aux équipes des festivals de s’organiser en conséquence.

En revanche, le fondateur du festival a des doutes sur le comportement individuel des participants. Sont-ils capables, dans une ambiance festive, de garder leur coupe et de la ramener au bar au moment du tour suivant ? ? Au milieu de la nuit, après le concert de Subtronics, le journaliste qui écrit ces lignes a pu constater que quasiment aucun gobelet n’avait été abandonné, contrairement à des milliers de bouteilles d’eau en plastique.

Certains festivals belges s’en sortent bien, comme Couleur Café à Bruxelles. Tapio a estimé son empreinte carbone à 471 tonnes, soit… 300 fois moins que Tomorrowland. Esperanzah à Floreffe se distingue par son respect des circuits courts et des produits frais. «  Nous les envions sur ce point. « , Carlo Di Antonio sourit.

Enfin, en terme de bonnes pratiques et malgré un bilan négatif, on citera… Tomorrowland, qui collabore avec le collectif After Festival Récup qui récupère tentes, sacs de couchage et nourriture laissés sur place. «  Nous aidons les sans-abris et les migrants à Calais, et pour nous, les sacs de couchage sont précieux. Nous les mettons tous dans les conteneurs, et en novembre-décembre, ils nous envoient les sacs de couchage lavés »affirme Renaud Jean-Louis, du collectif.

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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